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CINETOM
13 février 2022

PETER BOGDANOVICH, LA DERNIÈRE SÉANCE

             PETER BOGDANOVICH                1939 - 2022

             Acteur, Réalisateur, Producteur Américain 

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Le cinéma hollywoodien en deuil. Le cinéaste américain Peter Bogdanovich, figure du mouvement du “Nouvel Hollywood” et réalisateur de La Dernière Séance, est décédé à l’âge de 82 ans, a annoncé ce jeudi 6 janvier 2022 son agent. Toute l'oeuvre de Bogdanovich témoigne de son amour passionné pour le cinéma. Film après film, et souvent avec un certain bonheur, il rend hommage aux grands pionniers de l'âge d'or du septième art.

Peter Bogdanovich est un des réalisateurs les plus sensibles au charme de la nostalgie. De prime d'abord, il peut donner l'impression de suivre simplement, et habilement une mode culturelle. Mais en y regardant de plus près, on s'aperçoit que son attendrissement pour les "chères vieilles choses" n'est pas si suave qu'il y paraît; on y sent comme un goût de cendre, celle de tout ce qui a été brûlé sur l'autel du progrès et de la société de consommation. Pour Bogdanovich, entre le passé et le présent, il y a toujours une dégradation,une perte, une trahison.

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Peter Bogdanovich est né le 30 juillet 1939 à Kingston dans l'État de New York, il a été critique de cinéma avant de se lancer dans la réalisation. Fils d'un père serbe orthodoxe devenu pianiste et peintre à la fois, et d'une mère juive. C'est à quinze ans qu'il participe à une session d'été de l'Académie américaine d'art dramatique à Traverse City dans le Michigan où il suivra l'enseignement de l'actrice Eleanor Gould, puis formé par Stella Adler. En 1959, il monte sa première pièce de théâtre "Le Grand couteau" de Clifford Odets.

Par la même occasion, il devient acteur dans "Les Anges sauvages" (The Wild Angels,1966) de Roger Corman. Ses quatre premiers films dénotaient une largeur de vue, une maîtrise technique et une touche personnelle, telles que certains purent penser à l'apparition d'un nouveau George Cukor; ils révélaient une grande familiarité avec les conventions des genres, que Bogdanovich tenait de son activité de critique et de cinéphile passionné, mais aussi une capacité de régénérer les formules les plus éculées. Ces films témoignent de la connaissance et de l'amour de l'histoire du cinéma  d'un homme qui n'allait pas manquer l'occasion de lui rendre hommage : du cinéma d'épouvante, à travers Boris Karloff auquel il confie un rôle dans "La Cible" (Targets,1967) - l'ancien monstre roi des salles obscures y campe une vedette de cinéma terrifiée par un cauchemar bien réel -, aux films de série B en noir et blanc, en passant par la comédie sophistiquée, Will Rogers et John Ford - auquel le cinéaste consacrera un splendide documentaire, "Directed by John Ford" (1971), sans négliger les stars oubliées des années 30. Mais le plus grand charme des premiers films de Bogdanovich, c'est que ces hommages rendus au passé permettent de brosser le véritable portrait de l'homme contemporain et de ses problèmes.

Les premiers films du cinéaste possédaient un style sobre et délié, un peu comme ceux de Howard Hawks. Leur auteur semblait presque aussi éclectique que le grand maître du cinéma américain. Mais bientôt; ces belles promesses tournèrent court. Peter Bogdanovich devint un personnage public, un homme un peu trop en vue et un peu trop conscient de l'être. Il tomba amoureux d'une actrice, Cybill Shepherd et, dans "Daisy Miller" (1974) et dans "Enfin l'amour" (At Long Last Love,1975), il laissa ses sentiments l'emporter sur ce qui devait être une analyse très fine du goût populaire et ces deux films furent des échecs, suivis par un autre fiasco, le dernier en date, mais aussi le plus grave et le plus retentissant  : "Nickelodeon" (1976), évocation affectueuse de la naissance du cinéma au début du siècle, sur un mode léger. Peter Bogdanovich exhume ce passé et le parsème de savoureuses références cinéphiliques : citations, répliques légendaires, etc. Ainsi dans la séquence culminante du film, celle de la reconstitution de la "première" hollywoodienne de "Naissance d'une nation", dont on peut voir de nombreux extraits; assiste-t'on à l'apparition mythique de David Wark Griffith sous les yeux admiratifs de Ryan O'Neal mêlé au public. Malgré ce magnifique morceau de "cinéma sur le cinéma", le film était gâché par un scénario très confus. Il donna l'impression d'être l'oeuvre d'un homme trop désabusé pour pouvoir mettre en scène les émotions que le cinéma lui avait jadis procurées.

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Bogdanovich critique avait eu un grand mérité : faire connaître ce qui lui plaisait. Son long entretien avec Howard Hawks avait eu pour but d'accorder généreusement au vieux rêveur taciturne l'occasion de parler librement de ses pensées secrètes. Bogdanovich en fit tout autant avec Alfred Hitchcock et John Ford.

"La Cible" est d'ailleurs typiquement l'oeuvre d'un critique, un critique aussi pénétrant que passionné, si spirituel et imaginatif qu'il parvint à utiliser un film d'épouvante à petit budget que Roger Corman était en train de tourner, et à l'insérer dans son original thriller, centré sur un vieil acteur célèbre. Exploitant toutes les possibilités de ces différentes sources, "La Cible est en outre un véhicule idéal pour le talent de Boris Karloff. On y sent en même temps une grande pratique de l'univers d'Alfred Hitchcock par l'analyse remarquable de l'ambiguïté du cinéma, art qui joue autant sur l'identification que sur la distanciation. "La Cible" fut, en tant que premier film d'auteur, un des plus prometteurs. On y décelait une telle inspiration stylistique que toute distinction entre forme et contenu finissait par s'abolir.

"La Dernière séance" (The Last Picture,1971) est bien différent. Observation poignante et nostalgique d'un petit monde provincial en voie de disparition, ce film est sans conteste le meilleur de Peter Bogdanovich, celui qui, à le revoir, révèle une étonnante richesse. Adapté d'un roman de Larry McMurtry, il reconstitue la vie d'un petit centre urbain du Texas avec une précision et une fidélité dignes des chroniques que Jean Renoir réalisa dans les années 30. Se penchant avec tendresse sur les premiers émois sexuels de la jeunesse, le film raconte l'histoire  d'un groupe de jeunes adolescents englués dans un provincialisme étouffant et médiocre, et dont la seule évasion est constituée par les films qui passent dans un cinéma de quartier; une salle qui devra d'ailleurs bientôt fermer ses portes. De même que Renoir, Peter Bogdanovich a pour tous ses personnages une sympathie profonde.

L'année suivante, le cinéaste signe un autre bon film : "On s'fait la valise, Docteur ?" (What Up, Doc ?,1972), une comédie sophistiquée d'une grande netteté d'écriture, avec une interprète remarquable et une intrigue très compliquée, où l'on voit une fille un peu cinglée se promener dans san Francisco et chercher à séduire un jeune musicologue (Ryan O'Neakl). Elle se retrouve bien entendu, dans toute une séie de situations burlesques. Barbara Sreisand donne le meilleur d'elle-même dans ce film enlevé.

"La Barbe à papa" (Paper Moon,1973) va encore plus loin dans la même voie. Cette joyeuse comédie sur de sympathiques filous, sur le petit peuple de la Grande Prairie et les liens familiaux, est pleine de respect et de sensiblité pour les personnages, notamment pour la petite Addie Prey (Tatum O'Neal). "La Barbe à papa" est un film d'une grande tendresse sur la vieille Amérique rurale : avec ses longs plans et sa photographie en noir et blanc, il retrouve la fraîcheur et l'ingénuité des pionniers de l'âge d'or du cinéma.

Malheureusement ce film est suivi d'un désastre commercial : "Daisy Miller", banale adaptation sentimental du roman de Henry James sur une jeune Américaine qui va mourir en Europe. "Enfin l'amour"  - qui eut encore moins de succès - se présentait quant à lui comme une tentative pour associer le style de Jacques Demy à la musique de Cole Porter, dans l'espoir de réaliser une comédie musicale style années 30. Mais certains des interprètes du film ne surent pas servir le propos raffiné du cinéaste. Pour Bogdanovich la série noire n'était pas encore terminée, puisque son film suivant, "Nickelodeon", fut un nouvel échec.

Après trois ans de salutaire réflexion; le cinéaste revint derrière la caméra pour "Jack le magnifique" (Saint Jack,1979), film totalement inattendu tant par son thème, le choix du milieu qu'il peint que celui de ses interprètes. Il montre en tout cas que son auteur avait encore des choses à dire. Jack est un Américain "marginal" qui s'efforce d'améliorer sa situation sociale : petit maquereau dans un premier temps, il finira propriétaire d'un luxueux lupanar à Singapour...sans jamais perdre son remarquable sens des affaires et sans renier une rigide éthique personnelle. Ce film confirme toute la subtilité de Bogdanovitch et son talent de narrateur. Un réalisateur aussi doué pour entrer dans méandres de la psychologie de ses personnages ne pouvait pas rester longtemps dans l'ombre. Le succès de "Et tout le monde riait" (They All Laughed,1982) aillait d'ailleurs prouver que Bogdanovich, qui esquisse ici, d'une main légère et avec ironie, une galerie de portraits bien new-yorkais, avait retrouvé son inspiration. L'intrigue se développe autour des enquêtes de trois détectives privés désinvoltes (Blaine Novalk, Ben Gazzara et John Ritter) qui nouent des relations sentimentales avec les femmes qu'ils sont chargés de surveiller et qui se retrouvent impliqués dans une succession de quiproquos que le réalisateur observe d'un regard amusé. Si Peter Bogdanovich ne sera probablement jamais reconnu ni comme un maître ni comme l'égal de Howard Hawks, de George Cukor et d'Ernst Lubitsch, il fera figure de disciple respectueux ou plutôt de "suiveur" aux ambitions trop souvent trahies par des moyens limités. On notera également sa performance avec la réalisation du film "Mask" (1985) avec Cher et la suite de "La Dernière séance" avec "Texasville" (1990) avec Jeff Bridges. 

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                        La Dernière séance - 1971 - 

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                        On s'fait la valise, Docteur ? - 1972 - 

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                               La Barbe à Papa - 1973 -

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                               Enfin l'amour - 1975 -

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                      Jack le magnifique - 1979 -

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                     Et tout le monde riait - 1981

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                       Illégalement vôtre - 1988 -

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                    Bruits de coulisses - 1992 -

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                    Un Parfum de meurtre - 2001 -

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                    Broadway Therapy - 2014 - 

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*Affiches-cine * Cinetom

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