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8 mai 2022

SERGE REGGIANI, LE TEMPS QUI RESTE

                  SERGE REGGIANI             1922 -  2004

           Acteur, Chanteur Français

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Il y a 100 ans naissait Serge Reggiani, il était né le 2 mai 1922 à Reggio-Emilia en Italie. Le jeune Reggiani s'installe en France avec ses parents, lui n'a que huit ans, nous sommes en 1930. Son père, coiffeur à Paris, aurait bien aimé voir son fils lui succéder un jour. Mais, après un essai dans le monde de la coiffure en apprenti-coiffeur, Serge Reggiani opte pour le monde du spectacle.

Il s'inscrit au Conservatoire des arts cinématographiques à Paris, il est d'abord figurant au Châtelet et à Mogador. Sa fréquentation des cafés de la Porte Saint-Martin lui permet de nouer des amitiés solides qui vont le conduire à hanter les studios. A l'aube de la Seconde Guerre mondiale, il fait de la figuration dans "Conflit" (1939) de Léonide Moguy, "Saturnin de Marseille" (1939) d'Yvan Noë et "Nuit de décembre" (1941) de Kurt Bernhardt.

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En 1940, il débute sur les planches dans la pièce de Roger Vitrac "Le Loup-garou", pièce dirigée par Raymond Rouleau. C'est un insuccès notoire qui l'inciter à prendre des cours de comédie au Conservatoire. Il en sort trois ans plus tard muni d'un premier prix de comédie et de tragédie. C'est avec un petit rôle de voyou dans "Le Voyageur de la Toussaint" (1942) de Louis Daquin qu'il a fait officiellement ses débuts à l'écran. "Le Carrefour des Enfants perdus" (1943) de Léo Joannon, son film suivant, confirme avec succès qu'il est un jeune premier dramatique promis au plus bel avenir. Durant le tournage de ce film de Léo Joannon, il fait la connaissance de celle qui va devenir sa première épouse, Jeanine Darcey. Ils ont deux enfants, Stephan et Carine.

"Les Portes de la nuit" (1946) de Marcel Carné fut un échec commercial malgré la présence de Yves Montand, Serge Reggiani et Pierre Brasseur puis le tournage de "Manon" (1948) de Clouzot n'eurent pas un retentissement pour sa carrière d'acteur ,mais sont les exemples les plus évidents de son tempérament tragique. Son image, d'abord de personnage maléfique, va se transformer à partir des "Amants de Vérone" (1949) d'André Cayatte où, dans son premier personnage sympathique, il devient, pour toute une génération , un inoubliable héros romantique. Son image se fixe définitivement dans la mémoire des cinéphiles avec cette merveille du 7e Art mal aimée à l'époque mais qui deviendra avec le temps un chef-d'oeuvre "Casque d'Or" (1952) de Jacques Becker où, il forme avec Simone Signoret, un couple d'amoureux frappé par la grâce. Jamais assurément, il ne retrouvera un personnage aussi riche.

Entre-temps, Serge Reggiani avait tourné un film dédié à l'enfance malheureuse dans "Au royaume des cieux" en 1949 sous la direction de Julien Duvivier ainsi que "Le Mystère de la chambre jaune" de Henri Aisner avec Pierre Renoir. Dès 1950, sa carrière prend une dimension éclectique et internationale. Son personnage d'Enjolras dans "Les Misérables" (1958) de Jean-Paul Le Chanois est parmi les meilleurs de cette époque déclinante du cinéma français.

A partir des années soixante, il perd peu à peu cette étiquette de maudit et ses yeux de cocker tombants l'entraîne vers des cieux plus éclectiques. En 1958, le héros romantique est devenu un acteur de composition auquel la maturité va apporter de nouveaux personnages. Remarié avec Annie Noël, il mène, avec un certain bonheur, une double carrière théâtrale et cinématographique. Julien Duvivier, dont on connaît le goût pour les films tout en noirceur, le convie à se joindre au huis-clos de "Marie Octobre" (1958) aux côtés de Danielle Darrieux, Lino Ventura, Bernard Blier, Paul Meurisse ou Noël Roquevert. Mais c'est d'Italie, où il a tourné plusieurs films que nous vient le nouveau visage de Serge Reggiani, en adulte que la vie a marqué, avec son personnage du "Guépard" (1961) de Luchino Visconti. Peu après, Jean-Pierre Melville en fait un héros admirable d'ambiguïté dans "Le Doulos" (1961).

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Pour Reggiani, c'est assurément une nouvelle partie de sa carrière qui commence. Mais la chance n'est pas de son côté et ce fervent défenseur du métier en artisan n'a pas l'heur de plaire aux vendeurs de strapontins. D'où une éclipse qui va durer plusieurs années, malgré ses rôles dans "Les Aventuriers" (1966) de Robert Enrico avec Lino Ventura et Alain Delon ou "La Vingt-cinquième heure" (1966) de Henri Verneuil avec Anthony Quinn, mais qu'il met à profit pour réfléchir et vivre. Certains cinéastes lui restent fidèles. Ainsi les cinéastes Robert Enrico ou encore Jean-Pierre Melville lui demande, de jouer un coiffeur dans "L'Armée des ombres" (1969); quant à Enrico, celui-ci lui propose d'incarner un caïd dans "Les Caïds" en 1972 aux côtés de Jean Bouise et Michel Constantin. Huit ans plus tard, il sera également à l'affiche du film "L'Empreinte des géants", également de Robert Enrico.

L'amitié compte beaucoup dans cette période de sa vie. Celle de Roger Pigaut, ancien comédien qui transforme les aventures policières en partie de plaisir entre amis "Compte à rebours" (1970) mais aussi "Trois milliards sans ascenseur" (1972) puis Claude Sautet ému par le tragique de sa personnalité lui propose un rôle important dans "Vincent, François, Paul et les autres" (1974). Reggiani a l'âge de jouer les pères de famille. Claude Lelouch, Michel Lang et Jacques Rouffio font, tour à tour, appel à lui pour remplir cette fonction, sachant qu'il amènera un incontestable poids humain. Touchant avec son personnage d'écrivain en panne d'inspiration de "Vincent, François, Paul et les autres" ou inquiétant dans celui de commissaire non conformiste dans le film de Claude Lelouch dans "Le Chat et la souris" (1975) avec Michèle Morgan, il est proprement stupéfiant en sorcier indien, le crâne rasé, dans le western burlesque de Marco Ferreri "Touche pas à la femme blanche" (1973).

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Ses admirateurs ont toujours su qu'il y avait du rire dans sa tristesse. Et il en a donné une incontestable preuve dans cette autre carrière, menée avec passion depuis plus de dix ans, celle de chanteur. Son tour de chant est original et sa prestation avec son fils Stéphane, en 1977 à Bobino, est resté longtemps dans toutes les mémoires.Après les années 80, Serge Reggiani ne trouvera plus que des rôles secondaires, il est gangster vieillissant dans "Mauvais sang" (1986) et "Ne reveillez pas un flic qui dort" (1988) de José Pinheiro, pittoresque patron de snack dans "J'ai engagé un tueur" (1990) de Aki Kaurismäki, ancien propriétaire d'une scierie dans "Coup franche" (1989) de Jean-Pierre Sauné, malade hospitalisé, il échange ses souvenirs de militant antifasciste avec Marcello Mastroianni "L'Apiculteur" (1986) de Theo Angelopoulos. 

Avec le tournage du film de Josée Dayan "Plein fer" il se retrouve en haut de l'affiche aux côtés de Jean-Pierre Bisson, Olivier Martinez et Patrick Bouchitey. Il incarne un propriétaire de café qui enseigne à son petit-fils (François Négret) l'art des boules provençales. Il est également la vedette des deux films réalisés par son fils Simon, l'un court "Zani" (1991), l'autre long "De force avec d'autres" (1993) qui se veulent avant tout des portraits de Serge Reggiani; l'un et l'autre passeront inaperçus. C'est donc comme chanteur que Serge Reggiani est mort célèbre grâce à des chansons à succès, écrites par Georges Moustaki "Ma Liberté", Jean-Loup Dabadie "Le Petit garçon", Gérard Bourgeois "Il suffirait de presque rien", Maxime Le Forestier "Ballade pour un traître", Claude Lemesle "Le Barbier de Belleville", Albert Vidalie "Les Loups" et tant d'autres titres qu'il interpréta en comédien, leur donnant un aspect théâtral, avec émotion, nostalgie, ironie et engagement, contre le totalitarisme et le racisme. A sa mort, le 22 juillet 2004 à Paris, c'est le chanteur plutôt que l'acteur de cinéma qui fut évoqué par la presse. Cela s'explique, sans doute par le fait que Serge Reggiani, durant les dernières années de sa carrière, n'avait guère eu, à l'écran, d'occasions de rappeler au public qu'il avait été, en particulier dans les décennies 40 et 50, l'une des figures les plus marquantes du cinéma français.

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