ALLAN DWAN, LE DERNIER PIONNIER
ALLAN DWAN 1885 - 1981
Cinéaste Américain
Son nom est associé aux débuts du cinéma américain. Pourtant, soixante ans plus tard, il sera toujours aussi connu, signant des films en cinémascope et en couleurs, travaillant même pour la télévision. Ayant débuté en 1909, après avoir reçu une formation d'ingénieur électricien - il n'est donc pas étonnant qu'on lui doive plus de quatre cents films.
Lors d'une interview faite par Peter Bogdanovitch, le réalisateur d'origine canadienne décrivit le caractère plutôt épique de ses premiers tournages : "Patents Trust engageait des voyous armés qui n'hésitaient pas à mitrailler nos caméras. Il nous fallait donc tourner dans les coins les plus reculés, en secret, et être armés nous aussi; nos cow-boys et nous-mêmes portions des revolvers à la ceinture. Nous étions forcés de placer des sentinelles, fusil à la main, tout autour du campement afin de pouvoir repérer les éventuels tireurs embusqués."
En 1976, Bogdanovitch s'est souvenu de tout ce que Allan Dwan lui avait raconté pour réaliser "Nickelodeon", avec Ryan O'Neal et Burt Reynolds : à cette époque, tourner un western d'une bobine semblait tenir de l'exploit ! Allan Dwan poursuit son récit : "En revanche, la pré-production était inexistante. J'entassais mon équipe dans deux véhicules et les repérages se faisaient tandis que nous roulions à l'aventure. Un site m'inspirait, nous nous arrêtions et j'inventais rapidement une histoire. Avais-je vu la falaise? Un canal d'amenée reliant deux ranchs? J'avais mon intrigue dans l'instant. Je tournais d'abord le combat du méchant et du héros au bord du ravin. Puis je m'arrangeais pour expliquer avec une autre scène que le bandit avait empoisonné le canal en amont. C'est là le script de "The Poisoned Flume" (1911), mais tous mes films se constuisaient ainsi, à l'improviste, car j'avais à cette époque une grande indépendance à l'égard des producteurs."
Joseph Aloysius Dwan est né à Toronto (Canada) le 3 avril 1885. Sa famille s'installe à Chicago où il poursuit ses études scientifiques et techniques tout en se passionnant, à l'université, pour le football américain et le théâtre. Ingénieur électro-mécanicien, il participe à la mise au point d'une lampe à arc à vapeu de mercure, ancêtre du néon. Les studios Essanay, où l'on utilise sur les tournages des projecteurs à incandescence qui fatiguent très vite les yeux des acteurs, embauchent le jeune ingénieur pour qu'il mette en oeuvre ce nouveau type d'éclairage. Arrivé dans le cinéma par le biais de la technique, Allan Dwan a tôt fait de s'apercevoir qu'on y gagne mieux sa vie en écrivant des scénarios, ce qu'il fait jusqu'en 1910, puis en réalisant des films, son activité dès 1911. C'est ainsi qu'il tourne, en trois ans, de 250 à 300 courtes bandes de dix à vingt minutes, films d'action, essentiellement des westerns, mélodrames et comédies sentimentales. Avec la simplicité et l'efficacité comme soucis premiers, il découvre et codifie - en même temps que David W. Griffith, Thomas Ince, Chaplin ou Mack Sennett, ces autres pionniers - la grammaire du langage cinématographique.
A partir de "Richelieu" (1914) son premier long métrage, Dwan s'affirme comme un maître du cinéma hollywoodien. Il dirige les plus grandes vedettes, Mary Pickford "Romance d'autrefois" (A Girl of Yesterday,1915), "Molly" (The Foundling,1915), Norma Talmadge "Panthea" (1917), Gloria Swanson "Zaza" (1923), "Scandale" (A Society Scandal,1924), "Tricheuse" (Manhandled,1924), "Vedette" (Stage Struck,1925), entre autres et, surtout, Douglas Fairbanks dont il épouse avec bonheur et dynamisme, l'humour et le panache pour signer, du "Métis" au "Masque de fer" (The Iron Mask,1929) , en passant par "Douglas a le sourire" (He Comes up Smiling,1918) et "Robin des bois" (Robin Hood,1922), quelques-uns des classiques du cinéma muet.
Allan Dwan tourne vite, il est très organisé : du lundi au vendredi, il "met en boîte" deux films d'une bobine, en moyenne. Les deux jours suivants sont réservés au développement et au montage du négatif. Le samedi et le dimanche, il se repose. Le lundi suivant, il repart "en expédition". Il prend néanmoins le temps de visionner les films des autres cinéastes, D.W. Griffith notamment, qui lui permet de découvrir de nouvelles techniques : une utilisation judicieuse des gros plans, l'éclairage en contre-jour, un jeu moins "théâtral" de la part des acteurs. Entre 1914 et 1915, Dwan passe au court-métrage. Il est associé à la compagnie de Griffith, Triangle. Il a l'occasion de diriger les soeurs Gish et Norma Tamaldge. Pour "Intolérance" de Griffith, l'ancien ingénieur électricien conçoit l'ancêtre de la caméra-grue (pour filmer le décor gigantesque représentant Babylone). un peu plus tard, il tourne plusieurs courts-métrages avec Douglas Fairbanks. Le meilleur résultat de cette collaboration fructueuse est nul doute "Robin des Bois", un des chefs-d'oeuvre du cinéma muet.
Pendant les années 20, Hollywood cherchant à limiter la grande indépendance qu'il avait connue à ses débuts, Dwan accepte volontiers de travailler dans les studios Astoria de la Paramount, situés à Long Island. Comme indiqué ci-dessus, c'est là qu'il fait tourner Gloria Swanson, dans des films comme "Zaza" et "Tricheuse", faisant d'elle une grande actrice. En 1929, après avoir tourné un dernier film muet de cape et d'épée, avec Fairbanks, "Le Masque de fer", Dwan réalise ses premiers films parlants sans difficulté majeure. Il est à la Fox. Avec son premier film parlant "L'Iceberg vengeur" (Frozen Justice,1929), histoire d'aventure et d'amour chez les Esquimaux, Allan Dwan avait fait une première incursion dans le cinéma sonore, en 1927, avec "West Point". Mais le cinéma parlant n'apporta pas au cinéaste autant de satisfaction et de succès que le muet.
Dans les années 30, il dirige Shirley Temple "Heidi la sauvageonne" (Heidi,1937), "Mam'zelle Vedette" (Rebecca of Sunnibrook,1938), Annabella et Tyrone Power dans "Suez" (1938) (L'ouragon est un des clous de la production), et, avec "Les Trois Louf'quetaires" (The Three Musketeers,1939) (dans laquelle Don Ameche nous émerveillera) et "Le Gorille" (The Gorilla,1939), donne aux Ritz Brothers, rivaux aujourd'hui oubliés des Marx Brothers, les deux meilleurs titres de leur filmographie. En 1933, de passage en Grande-Bretagne, il fait débuter Ida Lupino, alors âgée de quinze ans dans "Her First Affaire".
Nombre des derniers films d'Allan Dwan, tournés à l'économie pour le studio Republic, passèrent inaperçus. Certains, toutefois, témoignent de la pérennité du talent solide et efficace de leur auteur : "Iwo Jima" (1949), puissant film de guerre interprété par John Wayne, "Quatre étranges cavaliers" (Silver Lode,1954) et "La Reine de la prairie" (Cattle Queen of Montana,1954), westerns classiques mais au ton personnel, "Deux rouquines dans la bagarre" (Slightly Scarlet,1956), trépidant film noir pétri d'humour. On notera également ses deux autres réalisations qui furent moins importantes mais réalisées avec talent : "La Perle du Pacifique Sud" (Pearl of the South Pacific,1955) et "Le Bord de la rivière" (The River's Edge,1957). Allan Dwan, le dernier pionnier est mort à Los Angeles le 21 décembre 1981 à l'âge de 96 ans.
Robin des Bois - 1922 -
Scandale - 1924 -
Larmes de reine - 1924 -
Le Tango tragique - 1924 -
Vedette - 1925 -
Le Masque de fer - 1929 -
1938
Mam'zelle vedette
1943
La Belle du Montana - 1951 -
Tonnerre sur le Pacifique - 1951 -
Quatre étranges cavaliers - 1954 -
Les Rubis du prince Birman - 1955 -
Les Perles sanglantes - 1955
Le Bagarreur du Tennessee - 1955 -
1956
Le Bord de la rivière - 1957 -
La Ville de la vengeance - 1957 -
L'île enchantée - 1958 -
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