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28 mars 2018

DÉCÈS DE STÉPHANE AUDRAN, ACTRICE FÉTICHE DE CLAUDE CHABROL

                    DECES DE STEPHANE AUDRAN

           L'ACTRICE FETICHE DE CLAUDE CHABROL

                                                                                                1932 - 2018

 

 

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AFP, publié le mardi 27 mars 2018 à 19h19

Elle a incarné des bourgeoises devant la caméra décapante de son ex-époux Claude Chabrol, et connu deux de ses plus beaux rôles dans "Le Charme discret de la bourgeoisie" et "Le Festin de Babette": l'actrice française Stéphane Audran est décédée mardi 27 mars 2018 à l'âge de 85 ans.  "Ma mère était souffrante depuis quelques temps. Elle a été hospitalisée une dizaine de jours et était revenue chez elle. Elle est partie paisiblement cette nuit vers 2h du matin", a annoncé son fils Thomas Chabrol à l'AFP.

Figure du cinéma français des années 70 et 80, Stéphane Audran, qui s'était ensuite mise en retrait, avait reçu un Ours d'argent à Berlin en 1968 pour "Les Biches" de Claude Chabrol, un BAFTA britannique de la meilleure actrice en 1974 pour "Le Charme discret de la bourgeoisie" de Luis Buñuel et "Juste avant la nuit" de Claude Chabrol et un César de la meilleure actrice dans un second rôle pour "Violette Nozière", de Chabrol, en 1979.

"Stéphane était une très bonne comédienne. Elle était épatante pour jouer les femmes libres et indépendantes, comme elle l'était dans la vie", a réagi auprès de l'AFP le réalisateur Jean-Pierre Mocky, qui l'avait dirigée dans "Les Saisons du plaisir" en 1988. "Son charme discret habitait les films de Chabrol - et ceux de Rohmer, Lautner, Audiard, Tavernier et Buñuel (...) Sa présence, son élégance et sa voix inimitable restent et résonnent", a réagi sur Twitter la ministre de la Culture, Françoise Nyssen.

"Elle possédait tout à la fois l'élégance et le mystère, la désinvolture et la complexité", a salué la présidente du Centre national du cinéma (CNC) Frédérique Bredin. "Sa présence magnétique, son charisme fascinant et son intelligence du jeu ont profondément marqué le cinéma français". Énigmatique, cette actrice aux immenses yeux verts et à la voix traînante dut à sa froideur apparente de donner libre cours à l'imagination des cinéastes.

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De son vrai nom Colette Suzanne Dacheville, Stéphane Audran est née à Versailles (Yvelines) le 8 novembre 1932. Ses études secondaires achevées, elle suit des cours d'art dramatique avec Charles Dullin, Tania Balachova et Michel Vitold. Elle débute au théâtre dans des pièces de Shakespeare ("Jules César", "Macbeth") puis à la télévision et enfin au cinéma en 1957 dans "La Bonne tisane" de Hervé Bromberger.

Après avoir divorcé d'avec l'acteur Jean-Louis Trintignant, elle épousa en 1964, le metteur en scène : Claude Chabrol qui lui avait confié des rôles importants dans plusieurs de ses films notamment : "Les Cousins" (1959) aux côtés de Gérard Blain et Jean-Claude Brialy, vendeuse rêveuse dans "Les Bonnes femmes" (1960) avec Bernadette Lafont, "Les Godelureaux" (1960), "L'Oeil du malin" (1962) avec Jacques Charrier, maîtresse du tueur "Landru" (1962) avec Charles Denner dans le rôle-titre, Danielle Darrieux et Michèle Morgan, "Le Tigre aime la chair fraîche" (1964) avec Roger Hanin...C'est le début d'une très féconde collaboration de plus de 20 films. Elle se transforme en muse quasi exclusive de Chabrol, après lui avoir donné un fils, Thomas, et enchaîne les tournages à un rythme soutenu, parfois jusqu'à quatre par an

En 1968, Stéphane Audran obtient le prix de la meilleure actrice au Festival de Berlin pour "Les Biches", deux ans après ce fut le duo exceptionnel entre Jean Yanne le boucher et Stéphane Audran l'institutrice dans "Le Boucher" (1970) réalisé également par Chabrol, le film avait touché un large public et avait connu un succès commercial. Après avoir participée au tournage du film à sketches "Paris vu par" (1965), Stéphane Audran enchaîna avec "Marie-Chantal contre le docteur Kha" (1965), puis pendant l'Occupation avec  "La Ligne de Démarcation" (1966) avec Maurice Ronet, Jean Seberg, Daniel Gélin, Jacques Perrin et Jean Yanne pour ne citer qu'eux...Puis on peut citer également entre Chabrol et Audran : "Le Scandale" (1967), "La Femme infidèle" (1968), "La Rupture" (1970), "Juste avant la nuit" (1971) avec Michel Bouquet et François Périer, "Les Noces rouges" (1972), "Folies bourgeoises" (1975), "Les Liens de sang" (1977) et enfin, elle obtient lors de la Cérémonie des César 1978, le César du meilleur second rôle féminin pour son interprétation de la mère de Isabelle Huppert dans "Violette Nozière" (1978).

Dès 1972, elle commença une carrière aux Etats-Unis sous la direction de Samuel Fuller dans "Un Pigeon mort dans Beethoven Street" (Dead Pigeon on Beethoven Steet). La fin des années soixante et la première moitié des années soixante-dix furent marquées par la prééminence, dans le cinéma français grand public, de films à suspense policier décrivant des microcosmes sociaux dans des petites villes, de province ou de banlieue. Le réalisateur Etienne Périer a rendu hommage à Chabrol avec "Un meurtre est un meurtre" (1972) avec Brialy, Audran, Serrault et Robert Hossein.

Dérouté par Luis Bunuel, lors du tournage du "Charme discret de la bourgeoisie" (1972), elle retrouve lors du tournage des "Noces rouges" (1973) Chabrol dont il s'agit ici de son vingt-sixième film et le douzième qu'il tourne en compagnie de Stéphane Audran. Quelle autre comédienne française que Stéphane Audran peut s'enorgueillir du titre de chevalier du Dannebrog, la Légion d'honneur danoise? Elle a en effet reçu cette distinction plutôt "exotique" grâce au succès mondial, et à l'imprévisible ampleur!, du "Festin de Babette" (1987). Ce petit film sans grands moyens, oeuvre d'un quasi-inconnu, Gabriel Axel, au sujet a priori austère, plongeait au coeur d'une communauté luthérienne du Jutland, rigoriste et puritaine, une Française fuyant la répression de la Commune de 1871. Entrée au service de deux soeurs strictes et guindées, elle leur offrait, après un gain à la loterie, un "vrai repas français" et les soumettait, ainsi que leurs invités, à une tentation de bonne chère aussi raffinée qu'irrésistiblement voluptueuse. Stéphane Audran incarnait ce personnage avec une évidente jubilation; le film simple et émouvant, fut récompensé en 1988 de l'Oscar du meilleur film étranger et lui rapporta plusieurs prix d'interprétation.

Beau point d'orgue d'une carrière très contrastée, où les seconds rôles d'excentriques, volontiers perverses ou dégénérées, avaient succédé aux compositions de bourgeoises bovary-santes des années soixante-dix. Depuis 1980, Stéphane Audran avait en effet enchaîné des prestations colorées et souvent antipathiques : de l'épouse vulgaire et frivole de Philippe Noiret dans "Coup de torchon" (1981) de Bertrand Tavernier à la belle-mère envahissante de Patrick Dewaere dans "Paradis pour tous" (1982) de Jessua, de la modiste sans scrupules du "Sang des autres" (de Chabrol avec Jodie Foster), qui vit avec un général de la Wehrmacht, à la mystérieure "Dame grise" de "Mortelle randonnée" (1984) de Claude Miller (Adjani-Serrault), en passant par la nymphomane des "Saisons du plaisir" (1988) de Jean-Pierre Mocky et, surtout, la fausse paraplégique, indiscrète et revêche, de "Poulet au vinaigre" (1985), réalisé par son ancien pygmalion, Claude Chabrol. Si elle se sépare de Claude Chabrol en 1980, leur collaboration n'en souffrira pas pour autant. "Nous avons eu ensemble dix-sept années de rigolade totale et de bonnes bouffes. Je ne sais pas ce que j'aurais fait sans lui", confiera celle qui tournera encore avec son ex-époux cinq films pour le cinéma ou la télévision.

Divorcés en 1982, tous deux continuaient à travailler régulièrement ensemble : retenons de leurs collaborations "Betty" (1992) où elle interprète Laure, l'élégante veuve qui recueille dans son hôtel de Versailles l'héroïne, brisée et en état d'alcoolisme avancé (jouée par Marie Trintignant). Laure se sacrifie lorsque Betty lui vole son amant, elle se retire dignement du jeu et se laisse mourir afin que sa protégée survive. C'est l'un des plus beaux rôles de la période pour Stéphane Audran, qui tourne alors fréquemment à l'étranger, en particulier dans des films américains indépendants, et pour la télévision. Elle apparaît au petit écran entre autres devant la caméra de Chabrol "Les Affinités électives" (1981); "L'Escargot noir" (1987), et de Gérard Vergez "Le Droit à l'oubli" (1993) et dans le feuilleton à succès "L'Amour en héritage" en 1984. On la retrouve en 1994 dans la joyeuse troupe du "Petit Marguery" de Laurent Bénégui. En patronne bienveillante et distinguée du restaurant éponyme, épouse patiente du cuisinier Michel Aumont, elle délaisse les rôles d'odieuses mégères dont elle s'était fait spécialité, pour des personnages plus attachants et moins archétypes.  L'actrice ralentit ensuite le rythme des tournages - on la verra toutefois dans "Ma femme s'appelle Maurice" de Jean-Marie Poiré en 2002 ou "La fille de Monaco" d'Anne Fontaine, 2008 -, donnant une nouvelle orientation à sa vie, en quête de sérénité par les médecines douces, l'acupuncture et la pensée chinoise. Mardi 27 mars 2018 vers deux heures du matin s'est éteinte l'une de nos meilleures actrices françaises...

 

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Stephane Audran - La femme infidèle

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Claude Chabrol - Le boucher (1969)

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Extrait du film "Violette Nozière" avec Stéphane Audran

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*Affiches : Affiches-cine/Cinéma-français/Cinetom

 

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