CHARLES BOYER, AMBASSADEUR DU CINEMA FRANCAIS EN AMERIQUE
CHARLES BOYER 1897 - 1978
Acteur Français naturalisé Américain
Charles Boyer est né le 28 août 1897 à Figeac dans le Lot. Son père, industriel aisé, désire que Charles Boyer fasse de bonnes études. Il les commence à Toulouse puis étudie la philosophie à la Sorbonne. En 1918, Raphaël Duflos, sociétaire de la Comédie-Française et professeur au Conservatoire, tournait non loin de Figeac. Il sut convaincre les parents du jeune Charles de le laisser monter à Paris pour tenter de réaliser son idée fixe : suivre la voix tracée par Lucien Guitry, sa grande admiration d'enfance.
Boyer aime profondément le théâtre et ne le négligea par la suite que malgré lui. Dès 1920, Charles Boyer débutait au pied levé dans "Aux jardins de Murcis sous la férule de Firmin Gémier, et entrait au Conservatoire en même temps que Pierre Blanchar (qui restera un ami intime) et Fernand Ledoux. Il obtient un deuxième prix et apparaît sur les scènes parisiennes y obtenant un succès croissant.
Peu à peu il s'impose à travers une série de créations très remarquée : "La Dolorès" avec Pierre Blanchar, "Le Venin" avec Yvonne De Bray, "Le Secret" en compagnie de Simone et Gaby Morlay. Parallèlement au théâtre il fait un peu de cinéma mais le muet ne le tente guère.
L'avènement du parlant ne pouvait que servir le comédien, c'est ainsi qu'il se rend pour une première fois à Hollywood, tourner les versions françaises de deux productions ambitieuses de la MGM : "Le procès de Mary Dugan" (The Trial of Mary Dugan,1929) de Marcel de Sano ainsi que "Révolte dans la prison" (The Big House,1930) de Paul Fejos. Il fit de même en Allemagne pour quatre films de la UFA, mais Irving Thalberg, grand maître de la production de la MGM racheta son contrat allemand et le rappela en Californie où Boyer retrouva avec plaisir ses amis Adolphe Menjou, Claudette Colbert, Louis Gasnier, Françoise Rosay et Jacques Feyder. Il pense cette fois y demeurer, réussir dans cette Amérique qui a si bien accueilli Maurice Chevalier chez qui habite Boyer, mais malgré un film aux côtés de Claudette Colbert, un autre avec Jean Harlow, il n'obtient aucun contrat durable, passe de la MGM à la Paramount et, très amer, rentre en France en 1932.
La routine bernsteino-l'herbieresque l'y attend, "Le Bonheur" (1934) et "L'épervier" (1933), suivie d'une nouvelle et double dose de Farrère lorsque Boyer tourne les deux versions, française et anglaise de "La Bataille" (1934) de Nicolas Farkas, avec Annabella et Merle Oberon. C'est autant par haine du nazisme qui venait de contraindre Fritz Lang à quitter l'Allemagne, que par admiration pour l'auteur de "Metropolis" que Boyer tourne ensuite "Liliom" (1934) qui fait apprécier la violence brute dont il peut-être capable. Mais il est décidémment voué à l'Amérique, et il accepte de suivre Erick Charell, l'auteur du "Congrès s'amuse", qui part à Hollywood tourner "Caravane" (1934) pour la Fox. Le film est un échec, mais Charles Boyer rencontre à cette occasion celle qui sera la compagne de sa vie entière, l'anglaise Pat Paterson qu'il épousa en 1934.
Avec "Mondes privés" (Private worlds,1935) de Gregory La Cava produit par Walter Wanger, Charles Boyer en psychiatre éprit de sa consoeur Claudette Colbert connait son premier vrai succès américain. La suite rejoint la légende : partenaire de Katharine Hepburn dans "Break of Hearts" (1935) et de Marlène Dietrich dans "Le Jardin d'Allah" (The Garden of Allah,1936) de Richard Boleslavsky, de Greta Garbo dans "Marie Walewska" (Conquest,1937) de Clarence Brown. Ceci est l'histoire d'amour immortel. Les détails imaginaires ajoutés par l'auteur n'ont pas faussé l'esprit de cette idylle historique, dit le carton au début du film. Cette production coûta plus de trois millions de dollars, chiffre énorme pour l'époque.
Charles Boyer donna la réplique à celle qui fut la première actrice américaine à se dénuder : Hedy Lamarr dans "Casbah" (Algiers,1938) de John Cromwell, puis ce fut Jean Arthur dans "Le destin se joue la nuit" (History is made at Night,1937) de Frank Borzage, Irene Dunne dans un film de Leo McCarey : "Elle et lui" (Love Affair,1939), Bette Davis avec "L'étrangère" (All This and Heaven Too,1941) d'Anatole Litvak, de Margaret Sullivan dans "Back Street" (1941) de Robert Stevenson et d'Olivia De Havilland avec "Par la porte d'or" (Hold Back the Dawn,1941) de Mitchell Leisen (le film entier est un flash-back au cours duquel Iscovescu s'introduit dans les studios de la Paramount et rencontre un réalisateur Dwight Saxon, auquel il propose de vendre son histoire contre 500 dollars pour rembourser Emmy, qui a dépensé toutes ses économies pour leur voyage de noces.
Les plus grandes actrices furent ses partenaires, la liste est longue, on retiendra aussi Joan Fontaine dans "Tessa, la nymphe au coeur fidèle" (The Constant Nymph,1941) d'Edmund Goulding, Barbara Stanwyck dans le film à sketches de Julien Duvivier "Obsessions" (Flesh and Fantasy,1943). Quant à Ingrid Bergman, son duo inoubliable au côté de Charles Boyer, complété par la performance de l'acteur fétiche du "Troisième homme", Joseph Cotten, réussirent à rendre à la postérité le film de George Cukor "Hantise" (Gaslight,1944). Quatre ans plus tard, les deux principaux interprètes furent à nouveau réunit dans "Arc de Triomphe" (Arch of Triumph,1948) réalisé par Lewis Milestone (a qui l'on doit "A l'Ouest rien de nouveau"). Conçu comme un grand film de prestige, alors qu'Ingrid Bergman était au faite de sa gloire et de sa popularité, réunissant le couple qui avait fait le succès de "Hantise", "Arc de Triomphe" fut un retentissent désatre financier.
Boyer donna la réplique également à Lauren Bacall dans "Agent secret" (Confidential Agent,1945), Ann Blith dans "Vengeance de femme" (A Woman's Vengeance,1948) de Zoltan Korda et tant d'autres. Il fut dirigé par des mains de maîtres : Frank Borzage, Ernst Lubitsch, Fritz Lang, Clarence Brown, George Cukor, John Stahl...Charles Boyer mesure ce qu'Hollywood réserve à ses élus. Cependant il revient en France en 1935, accueilli avec respect par les plus grands, Pagnol, Raimu, Jouvet, Michel Smon, en véritable ambassadeur du cinéma français en Amérique. Il accepta l'offre de son vieil ami Anatole Litvak, qui après avoir recusé Pierre Blanchar et Fresnay, lui offrait le rôle de l'archiduc Rodolphe dans "Mayerling" (1936) avec Danielle Darrieux.
En dépit des vingt années qui les séparaient, ce couple idéal fit un triomphe dans toute l'Europe et plus tard en Amérique, mais Boyer ne demeura pas en France. Les Etats-Unis étaient devenus son pays, dès 1936 il demandait sa naturalisation et militait pour la réélection de Roosevelt à la présidence. "Orange" (1937) réalisé par Marc Allégret produit par André Daven clot en 1938 la liste des films tournés en France par Charles Boyer avant la guerre.
A Hollywood il manque par deux fois l'Oscar et refuse les offres de contrat à long terme, ce qui lui permet selon les films de passer d'un studio de production à l'autre. Il les parcourt tous et préserve son indépendance au point de passer le plus souvent d'agent. Parmi ses pairs Gary Cooper, Spencer Tracy, Clark Gable, James Cagney, Cary Grant, il est la seule star masculine de premier plan dont l'anglais ne soit pas la langue maternelle. Epargné par la presse à scandale, le couple Boyer accueille généreusement les nouvelles recrues débarquées sur Sunset Boulevard. Pat s'occupant des Britanniques, lui de ses compatriotes Simone Simon, Danielle Darrieux, Annabella. Franchement antinazi, Boyer s'engage en 1939 et rejoint la ligne Maginot. Démobilisé, il rencontre le général de Gaulle, qu'il retrouve à Londres en juin 1940. L'acteur apporte une aide appréciable aux réfugiés juifs puis repart en Amérique, en compagnie d'Henry Bernstein. L'un à New-York l'autre à Los Angeles se comporteront en ambassadeurs officieux de la France libre. Boyer fondant à l'automne 1940 la French Research Foundation, centre de documentation et lieu d'accueil français à Hollywood.
Après la guerre, son personnage à l'écran évolue. Toujours distingué, il n'est plus un jeune premier mais un fort séduisant quinquagénaire très plausiblement capable de séduire Jennifer Jones ou Linda Darnell. Douglas Sirk, Charles Vidor, William Wyler, Vincente Minnelli par trois fois le requièrent. L'éblouissant "Madame de..." (1953) de Max Ophüls pour lequel il revient en France le rapproche à nouveau de Danielle Darrieux. Cette oeuvre de maturité est sans doute le meilleur rôle de Charles Boyer qui, plus jeune, usait à l'excès de son oeil et de sa voix de velours. Ici son ironie insinuante, sa virtuosité dans la détresse élégamment contenue correspondent brillamment aux voltes ophulsiennes.
Avec Christian-Jaque, Boyer apprécia aussi un autre registre, une autre approche que celle qui l'eut avec Ophuls, avec son charme, il sut donner le meilleur de lui-même en incarnant le comte Muffat dans "Nana" (1955) sous les traits de la belle Martine Carol, puis deux ans plus tard, ce fut la rayonnante Brigitte Bardot qui lui donna la réplique avec "Une Parisienne" (1957) de Michel Boisrond. Celui qui fut l'ambassadeur du cinéma français en Amérique avait également tourné pour Alain Resnais dans "Stavisky" (1974) son avant-dernier rôle au cinéma au côté de Jean-Paul Belmondo. Charles Boyer a mis fin à ses jours au lendemain de la mort de sa femme (quarante-ans de vie commune, un fils unique qui se suicide), le 26 août 1978.
* De nombreux textes ont paru dans l'ouvrage "Noir&Blanc" d'Olivier Barrot et Raymond Chirat- Certaines des affiches sont la propriété des Affiches-cine.com.
La Bataille - 1934 de Nicolas Karkas
1936
Casbah (Algiers) - 1938 de John Cromwell
L'Etrangère - 1940 de Anatole Litvak
Tessa, la nymphe au coeur fidèle -1941 de Edmund Goulding
Six destins - 1942 de Julien Duvivier
1943
1944
1946
1948
Tonnerre sur le temple - 1952 de Charles Vidor
1953
1955
1956
1961