CHARLES VANEL, LA LONGÉVITÉ DU CINÉMA FRANCAIS
CHARLES VANEL 1892 - 1989
Acteur Français
Charles Vanel c'est la force tranquille du cinéma. Du jeune premier du muet au vieillard de ses derniers films, c'est le même regard assuré, la même stature imposante et cette voix qui s'affirme sans qu'il lui soit besoin d'élever le ton. Au cours d'une vie et d'une carrière qui se confondent avec l'histoire du cinéma il a tout joué avec conscience, avec talent sans jamais faire "la star" et en protégeant sa vie privée. Acteur de théâtre dès 1908, de cinéma en 1912 il a tout de suite fait preuve de rigueur et d'exigence. A la fin du muet, après cinquante films, il s'est même essayé à la mise en scène avec "Dans la nuit", dont la diffusion a été gênée par la naissance du parlant. Mais, très vite, il fut un des grands du nouveau cinéma. Quelques titres suffisent : "Accusée, Levez-vous", "Le Grand Jeu", "Les Croix de Bois", "Les Misérables", "L'équipage", "La Belle équipe", "Le Ciel est à vous", "Les Affaires sont les affaires", "Le Salaire de la peur", "La Main au collet, "La Mort en ce jardin", "La Vérité", "L'Ainé des ferchaux",Sept morts sur ordonnance", "Cadavres exquis", "Trois Frères", "Si le soleil ne revenait pas", "Les Saisons du plaisir"...
"Le Ciel est à vous" de Jean Grémillon, une grande réussite du temps de l'Occupation, "Le Salaire de la peur" de Clouzot qui lui valut le prix d'interprétation à Cannes 1952. Il retrouvera plusieurs fois Clouzot et tournera avec les plus grands de Bunuel à Melville, de Scola à Rosi...Le parlant ne l'avait pas désorienté, la télévision ne le surprend pas davantage. Dès 1955, il participe à des émissions et des films télévisés où comme au cinéma, il impose sa puissance nuancée d'une bonté plus évidente avec l'âge, et avec le choix des rôles. En 1982, il avait fêté ses 90 ans et ses 70 ans de carrière, et il reste fidèle à ses engagements : "Je jouerai tant que mes forces me le permettront". Robert Chazal. /Charles Vanel décède peu de temps après la disparition d'un autre grand acteur du cinéma français : Bernard Blier.
Charles Vanel est né le 21 août 1892 à Rennes. Il passa son enfance à Saint-Malo, se destinant à l'école navale. Sa vue n'étant pas assez bonne, il dut renoncer à la carrière de marin. A l'âge de douze ans, Vanel suit ses parents à Paris et devient spectateur assidu du théâtre Montparnasse. De là, lui vient l'idée et le goût du métier d'acteur. Charles Vanel débute sur les planches, à l'âge de 16 ans. En 1908, joue "Hamlet", "La bouquetière des innocents".
En 1912, il rencontre Robert Péguy qui lui donne son premier rôle au cinéma avec "Jim Crow" dans lequel Vanel incarne un garçon de café. La guerre mondiale éclate, il est libérée en 1916 pour une tournée de propagande en Amérique du Sud. A son retour, il entre chez Firmin Grenier au théâtre Antoine. En 1922, c'est Robert Boudrioz qui, dans le film "L'Atre" lui donne son premier rôle important, quelques années plus tard, il tournera de nouveau avec le même réalisateur dans "Tempêtes" (1922) au côté de Ivan Mosjoukine. La critique ayant accueilli le film avec enthousiasme et avait déploré que la censure ait fait supprimer certains passages jugés remarquables. L'interprétation des quatre personnages principaux a été unanimement louée et la bagarre entre Ivan Mosjoukine et Charles Vanel a fortement impressionné les spectateurs, l'interprétation sobre et nuancée des comédiens. Plusieurs critiques ont qualifié "Tempêtes" de chef-d'oeuvre.
On peut noter, pendant cette période de 1910-1929 d'avoir été dirigé par Jacques De Baroncelli dans "Pêcheur d'Islande" (1924) puis avec René Clair dans "La Proie du vent" (1926) un film mineur. En 1929, Charles Vanel met en scène et interprète l'étonnant film onirique "Dans la nuit". C'est la fin d'une époque, et le dernier film muet de Vanel, premier rôle d'une notoriété déjà affirmée. Impossible dès lors de tout énumérer Titres et noms propres s'empilent, il nous revient de faire notre choix et de noter sans s'en étonner que Charles Vanel et l'homme de la fidélité : au parlant, sept films avec Dréville, cinq avec Jacques De Baroncelli, trois avec Raymond Bernard, Maurice Tourneur et Henri-Georges Clouzot.
Ce fut Pière Colombier qui marqua la rentrée cinématographique de Charles Vanel avec "Chiqué" (1930), enchaîna avec "Accusée Levez-vous!" (1930) premier film parlant de Maurice Tourneur, il eut un succès considérable à sa sortie en passionnant les foules pour une intrigue policière qui devait lancer la mode des "films de prétoire". Vanel renouvella avec Tourneur dans "Maison de Danses" (1931) avec le même couple-vedette (Gaby Morlay/Charles Vanel) que le film précédent. Mais à la différence du premier, celui-ci fut un relatif échec, critique et commercial.
Humble poilu au massacre dans le poignant "Les Croix de bois" (1931), il est avec le même metteur en scène Raymond Bernard le meilleur Javert de la meilleure version des "Misérables" (1933), héros sans état d'âme aussi obstiné, aussi attachant au fond qu'est émouvant le Valjean d'Harry Baur. Gras et suant, son mastroquet du "Grand Jeu" (1933) de Jacques Feyder, à la brutalité inverse de l'humanité sans phrase du lieutenant d'aviation de "L'Equipage" (1935) d' Anatole Litvak. L'admirable ami jaloux de Viviane Romance qu'il compose dans "La Belle équipe" (1935) de Julien Duvivier est un homme simple, aussi plausible que l'écrivain célèbre qu'il dessine dans le charmant "Abus de confiance" (1937) d'Henri Decoin. Héroïque constructeur de chemin de fer en Chine dans "Les Pirates du rail" (1937) de Christian-Jaque, implacable officier français "Légions d'honneur" (1938) de Maucie Gleize, russe dans "La Brigade sauvage" (1939) de Jean Dréville ou canadien dans "La Loi du Nord" (1939) de Jacques Feyder avec Michèle Morgan et Pierre Richard Willm.
Il y eut aussi les autres films, ceux dont on ne parle pas souvent et qui ont pourtant marqué de nombreux cinéphiles, on peut citer "Au Nom de la loi" (1932) réalisé par Maurice Tourneur, Marcelle Chantal (Mère de l'actrice Micheline Presle) donna la réplique à Charles Vanel. C'est aussi le quatrième film réalisé par Touneur en France, depuis son retour des Etats-Unis. Tourné en Bulgarie, sur les bords de la Mer Noire et en Tchécoslovaquie, "Port-Arthur" (1936) avait permis de réunir Vanel et Danielle Darrieux. Vanel avait contribué en tournant le premier long métrage de Marcel Carné "Jenny" (1937) aux côtés de Françoise Rosay et Albert Préjean. Charles Vanel permis de clôturer de façon mélodramatique, le "cycle breton" de Jean Epstein avec "La Femme du bout du monde" (1937). Le film fut tourné en partie en décors naturels dans la région d'Ouessant. Il n'obtint pas le succès escompté...
Charles Vanel a évoqué le tournage des "Pirates du Rail", dans son livre de souvenir (Monsieur Vanel, Ed. Robert Laffont,1989). Il tourna dans "Carrefour" (1938) de Kurt Bernhardt avec Jules Berry et Suzy Prim, "La Nuit merveilleuse" (1940) au côté de Fernandel, "Haut-Le-Vent" (1942) de Jacques de Baroncelli avec Mireille Balin. Parfait de raideur dans les dignes adaptations de Jean Dréville : "Les Affaires sont les affaires" (1942) d'après Mirbeau, "Les Rocquevillard" (1943) d'après Bordeaux, il ne déteste pas la truculence sud-américaine qui lui assigne Jacques Becker dans son amusant premier film, "L'Or du Cristobal" (1939), ni l'émotion chaleureuse, la grandeur épique que sut si bien lui offrir Jean Grémillon à l'occasion de son meilleur film, "Le Ciel est à vous" (1943) : le petit garagiste époux de l'aviatrice Madeleine Renaud demeure davantage qu'un rôle dans un film, c'est une véritable figure, presque un type d'homme. Le tournage se déroula de juin à octobre 1943, l'histoire est inspirée d'un authentique exploit de Madame Dupeyron, femme d'un garagiste de Mont-de-Marsan qui battit en 1937, le record féminin de vol en ligne droite. Le film connut, à sa sortie un très grand succès public.
Vanel connut une brève éclipse entre 1948 et 1952, années qu'il passa en Italie à tourner une dizaine de films, dont l'excellent "Au nom de la loi" (1949) de Pietro Germi, dans lequel il interprétait un très vraisemblable chef de la mafia. Réhabilité par Clouzot avec "Le Salaire de la peur" (1952) qui lui valut un juste prix d'interprétation à Cannes. Commencé le 27 août 1951, le film est interrompu dès octobre, Véra Clouzot étant tombé malade, le tournage reprend de juin à septembre 1952. Vanel poursuit en tournant un autre film de Clouzot "Les Diaboliques" (1954) dont Simone Signoret, Paul Meurisse, Véra Clouzot, Michel Serrault, Pierre Larquey et Noël Roquevert sont les principaux interprètes.
Vanel atteignit de nouvelles hauteurs avec "La Main au collet" d'Hitchcock en 1955. "Hitchcock est très gai de nature, se rappelle Vanel, il a la plus belle collection de vins français qu'on puisse rêver.". En 1956, "La Mort en ce jardin" de Luis Bunuel en 1960, "La Vérité" (1960) de Clouzot, où Vanel en avocat d'assises livre le modèle du numéro d'acteur. Le film obtint l'Oscar du meilleur film étranger. Entre-temps, l'acteur ayant la plus grande longévité d'acteur du cinéma français avait aussi réussi quelques performances avec "L'Affaire Maurizius" (1954) de Duvivier, "Les Suspects" (1957) de Jean Dréville, où l'on pourra apprécier le duo Vanel-Jacques Morel. Il est aussi de l'aventure du "Gorille" avec "La Valse du Gorille" (1959) de Bernard Borderie avec Roger Hanin, succèdant à Lino Ventura.
Il fut encore mémorable en vieux gangster hypocondriaque de "L'Aîné des Ferchaux" (1962) de Jean-Pierre Melville avec Jean-Paul Belmondo et Michèle Mercier. Vanel a souvent écouté les propositions de cinéastes débutants, François Leterrier "Un Roi sans divertissement" (1963), le film reçut le Grand prix du cinéma français 1963 et le Grand prix du festival de Chicago 1964. En 1963, Jacques Deray signait son deuxième film avec "Rififi à Tokyo" (1963) avec Karl Heinz Boehm et Charles Vanel qu'il retrouva quelques mois plu stard avec "Symphonie pour un massacre" d'après le roman de Alain Reynaud-Fourton avec pour principaux interprètes : Jean Rochefort, Claude Dauphin, Michel Auclair, José Giovanni, et Michèle Mercier.
"Quand j'ai accepté "Ballade pour un chien" (1968), déclara Charles Vanel, ce fut un peu particulier car je ne connaissais pas Gérard Vergez et le rôle ne me plaisait guère. Mais à ce moment là, le cinéma français produisait tellement qui me semblaient sans queue ni tête que j'ai voulu en somme y aller voir de plus prés. Peut-être était-ce moi qui ne savait plus juger; ça valait le coup d'essayer. En fait, je n'ai pas été convaincu car je pense qu'au cinéma comme au théâtre, il faut une histoire à la base...Et puis, on ne joue pas la comédie tout seul. Pour donner son maximum, il faut que des partenaires vous donnent la réplique. Aussi, les scènes solitaires ne furent-elles pas faciles à tourner."
Vanel fut aussi en chirurgien de province mégalomane dans "Sept Morts sur ordonnance" (1975) de Jacques Rouffio, et inoubliable dans les séquences initiales, muettes, de "Cadavres Exquis" (1975) de Francesco Rosi. A cette même période, il donna la réplique à Alain Delon dans un film de José Giovanni "Comme un Boomerang" (1976), il est aussi dans le générique du film de Claude Chabrol "Alice ou la dernière fugue" (1977). Il fait partie de la distribution de "L'Imprécateur" (1977) réalisé par Jean-Louis Bertucelli avec Jean Yanne, Michel Piccoli, Jean-Pierre Marielle, Jean-Claude Brialy, Michael Lonsdale et Marlène Jobert.
Dans les années 80, on retiendra trois films : "Trois Frères" (1980) de Francesco Rosi, "Si le soleil ne revenait pas" (1987) de Claude Goretta et une participation furtive dans son ultime film "Les Saisons du plaisir" (1988) de Jean-Pierre Mocky avec une pléiade d'acteurs dont les aînés sont Charles Vanel et Denise Grey entouré de Jacqueline Maillan, Bernadette Lafont, Jean Poiret, Jean-Pierre Bacri, Darry Cowl, Sylvie Joly, Stéphane Audran, Richard Bohringer et tant d'autres....
Au cours du Festival de Cannes 1970, un hommage lui fut rendu sur la terrasse du palais, et il est, en 1979; le président de la cérémonie des oscars. Au cours des années 70 : "Sébastien et la Mary-Morgane", il participe à des dramatiques de télévision qui lui aQuelques jours après la disparition de Bernard Blier, on apprenait celle de Charles Vanel, le 15 avril 1989 à l'âge de 96 ans.
1923
1924 1925
Nitchevo (1926) de Jacques de Baroncelli
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Brigade volante "Il Bivio" (1950)
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