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29 mars 2025

ANTHONY MANN, UN DES GRANDS MAITRES DU WESTERN

ANTHONY MANN     1906 - 1967

Cinéaste Américain

Anthony Mann a consacré presque trente ans à la réalisation. Cela commence dans les années 40 avec de modestes films de série B et des films noirs; et s'achève dans les années 60 avec des superproductions internationales. C'est surtout pour la période intermédiaire, c'est-à-dire des années 50, qu'on se souvient de Mann aujourd'hui, pour avoir été l'un des meilleurs réalisateurs de westerns.

Considéré comme l'un des grands maîtres du western, l'œuvre d'Anthony Mann est dominée par des films qui offrent une vision originale et rigoureuse de l'Ouest. Mais à côté de ses westerns figurent également de remarquables films policiers. Anton Emil Bundsmann de son vrai nom, est né le 30 juin 1906 à San Diego (Californie, USA). Dès l'âge de dix ans, il s'intéresse au théâtre, on le retrouve successivement figurant, assistant et directeur de production, constructeur de décors et acteur.

En 1925, il joue dans la pièce de théâtre "The Dybbuuk", en 1926 dans "Little Clay Cart"; directeur de production au Theâtre Guild. Fonde une petite compagnie et fait des tournées dans le pays. Metteur en scène de 1933 à 1938 au Federal Theatre de New York. Son passé d'acteur et metteur en scène de théâtre à New York lui vaut d'atterrir un temps chez Selznick, lequel l'engage comme talent-scout et participe à la préproduction de "Autant en emporte le vent", puis "Rebecca" et tant d'autres.

En 1939, il devient l'assistant de Preston Sturges sur "Les Voyages de Sullivan" (Sullivan's Travels,1941). "Il vaut mieux faire quelque chose de nul que ne rien faire du tout" lui dira un jour le cinéaste. Mann retiendra le conseil, "J'étais décidé à faire le premier film qui se présenterait, bon ou mauvais" se souvient-il des années plus tard, et ce fut "Dr Broadway" (1942).  

Ses premières réalisations, sur lesquelles il ne pouvait d'ailleurs exercer qu'un contrôle limité, lui permirent toutefois d'expérimenter le langage cinématographique et d'affiner un style personnel, caractérisé par une rigueur dramatique et une concision visuelle dont l'efficacité est éclairante. Cette période d'apprentissage est marquée par quelques œuvres intéressantes, comme "La Cible vivante" (The Great Flamarion,1945) avec Erich von Stroheim, interprète principal, porte le films sur ses épaules dans un rôle qui lui va comme un gant parce que tellement proche du vrai personnage qu'il est dans la vie, sensible sous un dehors bourru. Les meurtres sont filmés avec une élégance et une précision quasi rituelles et où les mouvements de la caméra soulignent la complexité des rapports qui unissent les personnages, ou encore "Strange Impersonation" (1946), qui annonce ses meilleurs films noirs. Dans "Strange Impersonation", en effet, la description du "milieu" est saisissante : c'est déjà là l'œuvre d'un cinéaste en pleine possession de ses moyens, et qui saura bientôt donner la mesure de son talent avec des films que l'on aurait tort de considérer comme mineurs.

C'est donc avec "Desperate" (1947) qu'Anthony Mann entre de plain-pied dans la catégorie des grands cinéastes. Certains passages de ce film témoignent d'une exceptionnelle virtuosité cinématographique et sont baignés dans une atmosphère chargée d'angoisse et de terreur : par exemple la séquence dans laquelle les protagonistes luttent à la lueur d'une lampe dont le balancement provoque une alternance brutale de lumière et d'obscurité. La tension dramatique ainsi crée se trouve encore accentuée par les gros plans de visages en sueur et par l'expression véritablement sinistre que Raymond Burr confère à son personnage, le "méchant" bien sûr.

Réalisé l'année suivante, "La Brigade du suicide" (T-Men) porte la marque du meilleur Anthony Mann. Cette manière de documentaire policier évoque l'histoire de deux agents du fisc infiltrés dans une bande de faussaires et bénéficie d'une superbe photographie de John Alton, avec qui Anthony Mann tournera également "Marché de brutes" (Raw Deal,1948), l'excellent "Livre noir" (Reign of Terror,1949), "Incident de frontière" (Border Incident,1949) et "La Porte du diable" (Devil's Doorway,1950). Le style expressif, voir expressionniste de John Alton, fondé sur un jeu subtil des ombres et des lumières, s'accorde parfaitement au propos du cinéaste : susciter, par tous les moyens du langage cinématographique, une sensation de violence et de danger. Il ne s'agit aucunement, dans l'esprit d'Anthony Mann, d'accomplir une prouesse esthétique, mais bel et bien d'exprimer l'univers intrinsèque de son sujet. Le pessimisme social qui règne dans "La Brigade du suicide" se trouve justifié par la structure documentaire du récit, lequel n'évite pas un certain ton moralisateur : mais telle était alors la règle à Hollywood, où le code Hays imposait aux cinéastes une stricte autocensure. 

"La Brigade du suicide" lui permet de travailler pour la première fois avec un budget et des délais plus confortables. Il collabore même à la rédaction avec son scénariste, John C. Higgins. Il en résulte un thriller de qualité, filmé en extérieurs et vaguement inspiré d'un fait réel, où deux agents du Trésor Dennis O'Keefe et Alfred Ryder, parviennent à démasquer une bande de faux-monnayeurs. Le succès de "La Brigade du suicide", auquel fait suite "Marché de brutes", débouche sur un nouveau contrat à la MGM au début de 1949. Mann et Alton se retrouvent en extérieurs, dans le San Joaquin Valley, pour y mettre en images une autre histoire d'agents secrets "Incident de frontière". Ici, la caméra de Mann donne une résonnance dramatique aux décors naturels dans un style qui préfigure nettement celui des westerns que le cinéaste va tourner peu après.

Il faut bien reconnaître que Mann a marqué le western de son empreinte. D'emblée, il en signe trois  différents en 1950. "La Porte du diable" offre à Robert Taylor, star de la MGM, l'un de ses meilleurs rôles, celui d'un ancien soldat indien et héros de guerre qui revient chez lui après la guerre de Sécession, pour découvrir qu'il lui faut combattre l'injustice parmi les siens. Ce film appartient à la nouvelle génération de westerns qui allait se pencher avec générosité sur la condition des Indiens. Il est immédiatement suivi de "Winchester 73" et du film "Les Furies" (The Furies). Ce dernier western psychologique, parmi les plus noirs de Mann, nous conte de façon un peu décevante l'histoire d'une famille où l'on voit Barbara Stanwyck se bagarrer contre son père, gros éleveur joué par Walter Huston dans son dernier rôle à l'écran. "Winchester 73", bien supérieur, est le premier film que Mann tourne avec James Stewart. C'est aussi son premier grand succès au box-office. Le film s'attache aux effort de Stewart qui tente de récupérer son bien le plus cher, la carabine que lui a dérobée son propre frère. Admirablement photographié par un vieux routier de l'image, William Daniels, "Winchester 73" illustre la thématique de Mann -rivalité entre frères, conflits familiaux et violence, avec un héros peu banal à la personnalité complexe.

Deux ans s'écoulent avant que Mann et Stewart ne tournent "Les Affameurs" (Bend Of the River,1952), qui prouve avec quelle efficacité le réalisateur sait employer la couleur. Mann et l'acteur feront encore six autres films entre 1952 et 1955, westerns, drames purs ou aventures, et même une biopic sur Glenn Miller "Romance inachevée" (The Glenn Miller Story,1953). "Les Affameurs" et "Je suis un aventurier" (The Far Country,1954)  les emmènent à l'extrême nord-ouest des Etats-Unis, en Oregon et en Alaska, parmi les pionniers et les chercheurs d'or. L'action s'y déroule sur les vastes étendues de forêts, le long des fleuves mugissants et de temps en temps, à travers des paysages enneigés. Comme dans les meilleurs westerns de Boetticher, le héros Stewart est généralement aux prises avec un méchant intéressant et crédible - Arthur Kennedy dans "Les Affameurs" et Robert Ryan dans "L'Appât" (The Naked Spur,1953). Ce dernier, tourné dans les montagnes du Colorado, nous montre un chasseur de primes, toujours Stewart, lancé à la poursuite d'un hors-la-loi. L'acteur apparaît dans un dernier western, "L'Homme de la plaine" (The Man From Laramie,1955) face à Arthur Kennedy, là encore dans un drame de l'ambition, de la vengeance et du conflit familial. Mann ne semble pas intimidé par le grand écran pour ce premier film en cinémascope. Il s'y montre tout aussi attentif aux instants paisibles et intimes qui jalonnent tous ses films, généralement associés aux héroïnes incarnées par Julia Adams, Janet Leigh, Ruth Roman et, dans "L'Homme de la plaine", Cathy O'Donnell ou la vieille dame de l'écran Aline MacMahon, rancher entêtée.

Si les westerns que nous venons de citer ont été des succès au box-office, cela n'est en rien comparable au succès fracassant remporté par deux autres films Mann-Stewart, dans un tout autre genre, comme indiqué ci-dessus : "Romance inachevée", restitue admirablement la grande époque des orchestres de jazz dans les années 30. Les quarante premières minutes du film sont particulièrement excellentes, balayées par un humour subtil où l'on voit Stewart en musicien plaisamment excentrique échanger des répliques avec June Allyson, son épouse. La seconde moitié pèche par excès de sentimentalisme, mais il reste fabuleux moments de jazz. Stewart et Allyson refont équipe avec Mann, cette même année 1954 chez Paramount pour un autre succès moins fameux en Vista vision "Strategic Air Command".

Les qualités fondamentales des meilleurs films d'Anthony Mann se retrouvent dans un film de guerre tourné en vingt-quatre jours, "Cote 465" (Men in War,1957), dont le propos rappelle clairement celui de ses westerns : "J'ai voulu montrer les détails d'une guerre, c'est-à-dire tout ce que devraient supporter les soldats, à déclaré le cinéaste. Ils avaient du sable dans leurs bottes, leurs fusils s'enrayaient, ils enlevaient leurs casques au mauvais moment. Seul le fantassin m'intéressait, parce que lui faisait vraiment la guerre" (Positif, avril 1968). Si l'on ne retrouve pas, dans les westerns d'Anthony Mann, la puissance épique de ceux de Raoul Walsh, la ferveur unanimiste de ceux de John Ford ou l'intelligence ironique de ceux de Howard Hawks, il y règne en revanche un bonheur d'expression constant et un goût de la nature qui rappelle les grands peintres paysagistes américains du XIX e siècle, George Catlin ou Alfred Jacob Miller, par exemple.

En outre, ces westerns offrent une incontestable richesse dramatique, et ce n'est pas par hasard si Anthony Mann avait envisagé de transposer "Le Roi Lear", dans l'Ouest, avec John Wayne dans le principal rôle. Les conflits familiaux y sont exposés de manière quasi shakespearienne, même si la forme en est toujours simple et limpide, et les héros soumis à des tribulations morales et à des contradictions qui pourraient faire la joie d'un psychanalyste : à cet égard, les westerns d'Anthony Mann participent puissamment du renouvellement du genre et de son approfondissement.   

Hormis une comédie inattendue, "Le Petit arpent du Bon Dieu" (God's Little Acre,1957), Mann reste fidèle au western à l'approche des années 60. Dans "Du sang dans le désert" (The Tin Star,1957), Henry Fonda incarne un de ces héros manniens à la morale ambiguë, tireur chevronné qui en remontre au jeune shérif incarné par Anthony Perkins. Avec "L'Homme de l'Ouest" (Man of the West,1958), le cinéaste tente, non sans un certain succès, d'élever le western au rang de la tragédie grecque et l'on reste impressionné par la prestation de Gary Cooper et de Lee J. Cobb. Les qualités épiques de ce film le conduisent à adapter le western classique "La Ruée vers l'Ouest" (Cimarron,1960), d'après le roman d'Edna Ferber. Il ne pourra pas le tourner en extérieurs comme il le souhaitait, et désavouera le résultat. Sans renier sa passion pour le genre épique.

Mann vient terminer sa carrière en Europe. Après avoir été remplacé sur "Spartacus", il signe deux superproductions parmi les plus intelligentes du début des années 60, pour le compte du producteur Samuel Bronston et sur un scénario de Philip Yordan, avec lequel il avait déjà travaillé. Il y aura "Le Cid" (El Cid,1961), immense succès avec Charlton Heston, puis "La Chute de l'Empire Romain" (The Fall of the Roman Empire,1963); coûteux échec malgré la présence de Sophia Loren, James Mason, Alec Guinness et Stephen Boyd. Anthony Mann meurt le 29 avril 1967 pendant le tournage de "Maldonne pour un espion" (A Dandy in Aspic,1967), lequel sera achevé par l'acteur principal, Laurence Harvey.  

*Affiches-ciné *Cinetom

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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