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CINETOM
17 juillet 2022

NICHOLAS RAY, L'INDOMPTABLE

       

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          NICHOLAS RAY  1927 - 1983

           Cinéaste, Scénariste, Acteur Américain

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Nicholas Ray ou nos rêves d'adolescent des années 50 et 60. Un certain cinéma, Ray, Minnelli, Kazan, Fuller, etc. Réalisateur vibrant d'émotion, sensible et talentueux. En apportant, dans le système hollywoodien, une vision romantique et desespérée de l'Amérique, Nicholas Ray s'est imposé comme l'un des auteurs les plus originaux de la génération d'après-guerre.

Peu de cinéastes ont autant marqué la sensibilité de leur époque que Nicholas Ray, au point qu'il est devenu lui-même un personnage de film. Par-delà le fervent hommage que lui ont ainsi rendu de jeunes réalisateurs contemporains et notamment Wim Wenders, cette fascination est révélatrice, car Ray cristallise en lui les contradictions d'un artiste déchiré entre son inspiration créatrice et les impératifs commerciaux du système hollywoodien.

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Victime de Hollywood, certaines de ses oeuvres ont été mutilées ou modifiées contre sa volonté. Il n'en reste pas moins qu'il compte parmi les plus authentiques auteurs du cinéma américain. Nicholas Ray, de son véritable nom Raymond Nicholas Kienzle, est né le 7 août 1911 à Galesville dans le Wisconcin (Etats-Unis). Très jeune, il s'intéresse au théâtre, mais une rencontre déterminante va le pousser à faire des études d'architecture : il fait en effet la connaissance du grand architecte Frank Lloyd Wright et, à l'âge de seize ans, obtient une bourse pour suivre ses cours à l'université de Chicago. Plus tard, il dira s'être souvenu de l'enseignement du grand maître pour faire édifier le saloon de "Johnny Guitare" (Johnny Guitar,1954) sur le flanc d'une montagne, en plein désert : "parce que j'aimais la forme et la couleur de la pierre. C'était une espèce de Frank Lloyd Wright médiéval." Cette initiation aux arts plastiques aura inconstestablement une grande influence sur toute l'oeuvre de Ray, qui a été pronfondément marqué par les peintres expressionnistes et par l'art médiéval, ce qui explique sans doute en partie le caractère profondément baroque et flamboyant de son style.

Ray suit ensuite sa vocation théâtrale, participant à des tournées comme acteur et comme metteur en scène. Il s'intéresse aussi au folklore américain, faisant en 1938 un voyage d'études dans les montagnes Rocheuses. A son retour il travaille avec John Houseman, qui dirige la compagnie new-yorkaise The Phoenix, et il rencontre Elia Kazan. Après Pearl Harbor, Houseman responsable des émissions de propagande à la radio, fait appel à Ray, qui réalise ainsi la populaire série "Back Where We Come From" pour la C..B.S. Lorsque Kazan part à Hollywood tourner "Le Lys de Brooklyn", Ray le suit comme assistant-réalisateur. En 1946, il réalise la version télévisée de la célèbre pièce radiophonique de Lucille Fletcher "Sorry Wrong Number", qui retient l'attention de Dore Schary, le directeur de la production de la RKO, à l'époque véritable pépinière de jeunes talents. Si bien qu'en 1947, John Houseman entré à la firme comme producteur, fait appel à Nicholas Ray pour réaliser "Les Amants de la nuit" (They Live by Night,1948) avec Farley Granger.

D'emblée avec ce premier film, adapté d'un roman d'Edward Anderson, "Thieves Like Us", Nicholas Ray s'affirme comme l'un des cinéastes le plus intéressants de sa génération. "Les Amants de la nuit" offrent déjà les thèmes essentiels d'une oeuvre à la sensibilité exacerbée, qui exalte des êtres idéalistes et meurtris, inadaptés aux mesquines et dures réalités de la vie. Farley Granger et Cathy O'Donnell, révélation des "Plus belles années de notre vie" de Wyler, sont bouleversants d'émotion contenue dans des rôles de Bowie et de Keechie : deux adolescents vulnérables, traqués par la société, qui se réfugient dans l'amour. Pour Ray, la nuit n'est pas l'univers tragique des passions exacerbées (caractéristique du film noir), mais un asile de pureté et de tendresse qui permet d'échapper pour un trop bref instant à un quotidien sordide. Conception éminemment romantique, de même que celle d'une jeunesse dont la soif d'absolu se heurte vainement à l'incompréhension des adultes. Thème fondamental dans l'oeuvre de Nicholas Ray, dont le film le plus célèbre, "La Fureur de vivre" (Rebel Without a Cause,1955), montre encore trois adolescents interprétés par James Dean, Natalie Wood et Sal Mineo, réussissant à trouver quelques moments fugaces de paix et de bonheur dans le silence d'une maison abandonnée.

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C'est sans enthousiasme que Ray s'acquitte ensuite de la réalisation de trois films qui lui sont commandés par Howard Hughes en personne, le tout-puissant directeur de la RKO : "A Woman's Secret" (1949) et "Born to Be Bad" (1950), deux drames psychologiques retraçant l'ascension sociale d'héroïnes sans scrupules avec pour interprètes Gloria Grahame et Joan Fontaine, et "Les Diables de Guadalcanal" (Flying Leathernecks,1951), un film de guerre sur mesure pour John Wayne.

Beaucoup plus révélateur, "Les Ruelles du malheur" (Knock on Any Door,1949) connaîtra un très grand succès, dû en partie au prestige de Humphrey Bogart. Par-delà la thèse sociale, la condamnation de la société, véritable responsable de la délinquance juvénile, qui trahit l'influence d'Elia Kazan et des milieux théâtraux progressistes des années 30, le film témoigne d'une approche fort originale de la violence qui deviendra aussi une constante de l'oeuvre de Ray. Cette violence latente, à la fois révélée et exorcisée par l'amour, l'autre pôle de la vie, sera le principal sujet du "Violent" (In a Lonely Place,1950) et de "La Maison dans l'ombre" (On Dangerous Ground,1951), deux des meilleurs films tournés par Ray au début des années 50. Il est difficile de ne pas voir des allusions autobiographiques dans "Le Violent", dont le héros est un scénariste hollywoodien interprété par Humphrey Bogart soupçonné de meurtre et sauvé par l'alibi fourni par sa voisine Gloria Grahame, qui fut d'ailleurs l'épouse du cinéaste, avec laquelle il noue une liaison. C'est l'un des plus impressionnants portraits que Ray nous ait livrés : celui d'un homme brillant et intelligent, secrètement miné par la misanthropie et incapable de communiquer autrement que par des crises démentielles de violence. "La Maison dans l'ombre" offre une analyse psychologique très poussée en même temps qu'un retour à l'univers nocturne et romantique des "Amants de la nuit", avec l'histoire d'une jeune aveugle, remarquablement interprétée par Ida Lupino, qui apprivoise les instincts bestiaux d'un policier sadique (Robert Ryan).

Même caractère de violence, ici lié à un sentiment aigu et frustrant de l'échec, dans "Les Indomptables" (The Lucky Men,1952), qui nous plonge dans le monde fascinant et précaire des professionnels du rodéo. La violence, découverte par hasard, peut aussi agir comme un révélateur de pulsions profondes. Comédie dramatique superbement interprétés par Robert Mitchum et Susan Hayward. Ce film compte parmi les meilleurs sortis par la RKO en 1952. Ainsi le professeur de "Derrière le miroir" (Bigger than Life,1956) échappe-t'il à une vie médiocre grâce à la cortisone, qu'il a découverte pour des raisons strictement médicales et dont il abuse ensuite sciemment, l'exaltant sentiment de puissance donné par la drogue ayant éveillé sa mégalomanie latente. James Mason est hallucinant dans ce film qui peut apparaître aujourd'hui comme une vision moderne et prophétique et l'une des meilleures analyses de la toxicomanie. Dans "La Fureur de vivre", les accès de violence, jusqu'au paroxysme de la mort de Plato (Sal Mineo), scandent le douloureux mais inévitable passage de Jim (James Dean) de l'enfance à l'état d'adulte.

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A bien des égards, "Johnny Guitare" marque un nouveau départ pour le cinéaste. Il est engagé par le miniscule studio Republic pour revaloriser l'image du film de série B. Cela donne "Johnny Guitare", son premier western et sa première incursion dans l'Amérique du XIX ème siècle avec, en prime, la possibilité de travailler la couleur, il reviendra une seule fois en noir et blanc en 1957, pour "Amère victoire" (Bitter Victory). Pour l'heure, il signe un génial divertissement, le meilleur film tourné avec le procédé Trucolor mis au point par Republic. A partir d'une situation classique du genre, Ray opte pour l'originalité et le clin d'oeil, et les tonalités volontairement restreintes de l'image confèrent à ce western une stylisation et un symbolisme à la mesure du drame qui se déroule sous nos yeux, où Joan Crawford, arme au poing, accueille Mercedes McCambridge et ses acolytes. "Johnny Guitare" est incontestablement l'un des plus insolites westerns jamais réalisés, où Ray donne libre cours à une baroque somptuosité plastique. A noter également un autre western avec James Cagney "A l'ombre des potences" (Run For Cover,1954), tourné en Vistavision.

Rêveurs et misanthropes, les héros de Ray n'en sont pas moins des idéalistes impénitents, qui se lancent inlassablement dans des croisades vouées à l'échec pour défendre les dernières valeurs non encore souillées par la civilisation. C'est le cas du professeur alcoolique de "La Forêt interdite" (Wind across the Everglades,1958), qui défend avec acharnement les animaux des derniers territoires inviolés de Floride contre l'avidité des trappeurs. cette inspiration rousseauiste se retrouve dans "Les Dents du diable" (Ombre bianche,1959), dont le titre américain, "The Savage Innocents" est encore plus significatif.

Ray avait montré une très grande maîtrise de la couleur dans un film policier tendre et nostalgique comme "Traquenard" (Party Girl,1958). Il se révélera par contre beaucoup moins à l'aise lorsqu'il disposera de moyens importants, même s'il domine parfaitement les problèmes plastiques liés à l'écran large. "Le Roi des rois" (King of Kings,1961), qu'il tourne pour Samuel Bronston, n'évite pas tous les écueils de ce genre de superproduction, encore que l'approche choisie par Ray pour ce sujet pour le moins ambitieux ait le mérite de l'originalité. Il est vrai que le film sera mutilé par la M.G.M., notamment la scène du Sermon sur la montagne, filmée au départ en un seul travelling, et entrecoupée au montage de plans raccrocheurs. C'est donc avec beaucoup de désabusement que Ray entreprendra "Les 55 Jours de Pékin" (55 Days at Peking,1963), monumentale reconstitution de la guerre des Boxers dont il se désintéressera complètement au cours du tournage, de nombreuses séquences seront réalisées par Andrew Marton et Guy Green.

Tournant désormais le dos à Hollywood, Ray s'achemine vers des expériences plus révolutionnaires qui vont lui permettre de se livrer à une incessante introspection. Il donne notamment des cours de cinéma à l'université de New York et tourne avec ses étudiants "We Can't Go Home Again" (1973), étonnant semi-documentaire mêlant la vidéo au cinéma, à travers lequel il exprime son narcissisme tragique et exacerbé en incarnant un professeur fasciné par la mort. Mais sa santé, déjà fragile, décline au cours des années. Il réalisera cependant encore un remarquable sketch dans "Rêves humides" (Wet Dreams,1974), un film collectif qui tente avec plus ou moins de bonheur d'exprimer le caractère profondément subversif de l'érotisme, il y joue le double rôle d'un concierge et d'un prédicateur de sermons obscènes. En tant qu'acteur, on le verra encore dans "Hair" (1979), mais surtout dans "L'Ami américain" (Der Amerikanische Freund,1977) de Wim Wenders, où il joue aux côtés de Samuel Fuller, de Jean Eustache et de Gérard Blain....Rongé par le cancer, Ray sera enfin le "héros" de "Nick's Movie" (Lightning over Water,1980) de Wim Wenders , étonnant psychodrame fascinant et morbide d'un cinéaste qui met en scène sa propre agonie, il mourra d'ailleurs pendant le tournage, le 16 juin 1979 à New York, il avait 67 ans.

 

                             Les Amants de la nuit - 1949 -

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                 Secret de femme - 1949

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                La Maison dans l'ombre - 1952 -

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              Les Indomptables - 1952 -

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                  Derrière le miroir - 1956 -

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                Jesse James, le brigand bien-aimé - 1957 - 

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               Traquenard - 1958 -

 

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               Les Dents du diable - 1959 -

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            Acteur 

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