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CINETOM
17 juin 2018

VINCENTE MINNELLI, LE MAGICIEN DU CINÉMA HOLLYWOODIEN

        VINCENTE MINNELLI          1903 - 1986

         Cinéaste, Scénariste, Producteur Américain

 

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    *Copyright : lifetimetv

 

Vincente Minnelli a dit un jour lors d'une interview : "J'aime le réalisme dans tous les films". Rarement un artiste du septième art s'est montré aussi hermétique à la qualité de ses propres oeuvres. Car, quels que soient les talents de Minnelli, le moins que l'on puisse dire, c'est que le réalisme brutal est bien absent de ses films !. Véritable magicien du cinéma, Minnelli a porté à la comédie musicale à son point de perfection, ce qui ne doit pas faire oublier qu'il est également l'auteur de quelques chefs-d'oeuvre du mélodrame.

Tout le monde s'accorde à dire, fût-ce à divers titres, que Vincente Minnelli est un des grands maîtres du cinéma. Dès ses débuts de réalisateur, les critiques saluèrent l'élégance raffinée de son style; à partir du milieu des années 40, ils le considérèrent avant tout comme un des réalisateurs hollywoodiens capables de servir et d'enrichir par leur style et leur maîtrise de la mise en scène la matière de n'importe quel film. Plus récemment, leur attention s'est portée sur le côté "baroque" de ses films, sur la démesure dont il fait parfois preuve. Ces appréciations - qui sont loin d'être sans fondement - reflètent davantage, en fait, l'évolution de la critique vis-à-vis de Minnelli qu'un manque d'homogénéité dans l'oeuvre du réalisateur.

Vincente Minnelli est né le 28 février 1913 à Chicago, Illinois. Dès l'âge de 3 ans, il fait partie de la troupe familiale ambulante "The Minnelli Brothers Dramatic and Tent Show", Etudes secondaires à Chicago, à un sens du dessin remarquable. Aide-photographe, il est engagé en 1929 par la chaîne de théâtres Balaban and Katz; dessinateur et costumier des fastueux spectacles qu'on pouvait voir à Broadway dans les années 30, il participa activement à l'essor et au renouvellement de la comédie musicale.

Pour donner un nouveau souffle au genre, Minnelli multipliait les emprunts à l'art moderne, à la mode et à tout ce qui était susceptible d'enrichir le spectacle; il s'efforçait en outre d'abandonner les canevas usés jusqu'à la corde des sujets sentimentaux. Il était donc logique qu'Arthur Freed, qui tentait la même expérience au sein de la MGM, fit appel à ce jeune et brillant directeur artistique (il dirigeait alors le fameux Radio City Hall de New York). Déjà, en 1937, Minnelli avait été sollicité par Hollywood mais son séjour à la Paramount s'était soldé par un échec, et il avait regagné New York. Comme il eut l'occasion de le dire plus tard, la Paramount "n'était pas disposée à financer le genre de comédies musicales que moi je voulais faire." Il en allait tout autrement avec Arthur Freed et la MGM, assez prospère pour envisager les investissements nécessaires à ce genre de films. Soutenu par Freed, Vincente Minnelli tourna à la MGM une série de comédies musicales à bien des égards révolutionnaires. Les numéros musicaux venaient s'insérer logiquement dans l'intrigue, notamment dans son troisième long métrage, "Le Chant du Missouri" (Meet Me in Saint Louis,1944). Dans ce film, les chansons semblent naître naturellement des situations auxquelles les personnages sont confrontés, il s'agissait de son premier film en Technicolor, totalement minnellien...! dans cette chronique enchanteresse de l'Amérique du début du siècle, interprétée par Judy Garland, que le réalisateur épouse l'année suivante et dont il divorcera en 1951 - Liza Minnelli est leur fille, née en décembre 1946. "Le Chant du Missouri" reste un grand moment de cinéma pour la façon subtile dont les numéros musicaux s'y enchaînent, portés en souplesse par la narration. Comme l'explique Minnelli : "Personnellement, j'ai toujours pensé qu'il fallait donner autant d'importance aux numéros qu'aux séquences dramatiques, qu'ils devaient se fondre complètement dans l'histoire, et cela n'a jamais été le cas auparavant "La fraîcheur et la nostalgie primesautières du sujet, dont l'un des temps forts est la séquence de Halloween avec l'exquise Margaret O'Brien, ne doivent pas décourager le spectateur si l'on considère les moments de beauté pure offerts par ailleurs dans ce film, qu'il est bon de revoir plusieurs fois. 

Grâce à ce chef-d'oeuvre de la comédie musicale des années 40, Minnelli devient le styliste par excellence de la couleur et celui qui sait imprimer des mouvements fluides à sa caméra. En 1942, il avait dirigé son premier film en solo "Un petit coin aux cieux" (Cabin in the Sky), charmante fable musicale interprétée par des Noirs et servie par l'extraordinaire talent d'Ethel Waters, Lena Horne, Louis Armstrong, Duke Ellington et Cab Calloway. Minnelli fit un travail remarquable et, si le film paraît parfois emprunté et impersonnel, c'est sans doute parce qu'il a été tourné avec peu de moyens et qui lui manque la dimension expressive cruciale de la couleur, présente dans la plupart des oeuvres de la maturité. Depuis son arrivée à la MGM le 22 avril 1940, il s'était familiarisé avec les techniques du cinéma en collaborant à quelques comédies musicales "Débuts à Broadway" (1941), "Rio Rita" (1942) et "Panama Hattie" (1942). Le cinéaste réalise "Mademoiselle ma femme" (I Dood It,1943), farce poussive avec Red Skelton qu'on lui avait demandé de "sauver" après le renvoi du réalisateur initialement pressenti, se révèle une expérience des plus frustrantes.

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"Le Chant du Missouri" fut le premier film que Minnelli tourna avec Judy Garland. Mais cette rencontre allait aussi donner naissance à plusieurs oeuvres brillantes : "Le Pirate" (The Pirate,1947), parodie colorée au propre comme au figuré, des grands classiques du cinéma de cape et d'épée. S'y manifestait en plus un intérêt certain pour les derniers acquis de la mode et de la décoration d'intérieurs. Le rythme du montage, l'emploi harmonieux de la couleur, la fluidité des mouvements de caméra révélaient une volonté d'expérimenter les virtualités musicales du cinéma lui-même. Peu de temps avant, Minnelli avait réalisé "Ziegfled Follies" (1945) et le fameux ballet "Limehouse Blues". Vincente Minnelli et Judy Garland tournèrent aussi un film non musical, "L'Horloge" (The Clock,1945), histoire dramatique d'un soldat qui, en l'espace de deux jours, rencontre une secrétaire, tombe amoureux d'elle et l'épouse. L'intervention personnelle de Judy Garland auprès du producteur Arthur Freed menaçant d'annuler le tournage à cause de désaccords de la comédienne avec Fred Zinnemann, le premier réalisateur choisi, permit à Vincente Minnelli de signer son premier film non musical, le film fut inédit jusqu'en 1970. Quant à "Yolanda et le voleur" (Yolanda and the Thief,1945), Minnelli déclara : "J'ai essayé" de faire un film qui utilise des couleurs semblables à celles d'une boîte de peinture pour enfants". 

Qu'un réalisateur de comédies musicales se transforme en réalisateur de mélodrames ne doit pas surprendre outre mesure : "mélodrame", étymologiquement, ne désigne-t'il pas un drame accompagné de musique? Il suffit de remplacer les joyeux numéros de chant et de danse de la comédie musicale par quelques scènes fortes, la plupart du temps soutenues par une musique plaintive. Au-delà de leur apparente légèreté, on trouve déjà dans les musicals de Minnelli des éléments d'inquiétude qui allaient pouvoir s'exprimer pleinement dans ses mélodrames.

Les mélodrames de Minnelli explorent les aspects les plus obsédants et les plus angoissants de l'expérience humaine à partir de situations très diverses. Le cadre classique du mélodrame hollywoodien est presque toujours celui de la moyenne bourgeoisie de province. Minnelli se conforma souvent à cette tradition notamment dans des films comme "Lame de fond" (Undercurrent,1946). Si l'on excepte "L'horloge", réalise deux ans plus tôt, celui-ci marque la première incursion du cinéaste dans un univers dramatique. C'est à la demande du directeur de production de la MGM, Pandro S. Bermann qu'il réalisa ce mélodrame criminel romantique" en noir et blanc, ponctué par le troisième mouvement de la Quatrième Symphonie de Brahms. Il y eut aussi "Comme un torrent" (Some Came Running,1958) et "Celui par qui le scandale arrive" (Home From the Hill,1959). Autant de films qui décrivent les tensions de la vie familiale : rapports de force et dépendance entre parents et enfants, rivalités entre frères et soeurs, heurts entre les sexes. La plupart de ces conflits font irruption dans bien d'autres groupes que celui de la cellule familiale, par exemple parmi les cinéastes hollywoodien des "Ensorcelés" (The Bad and the Beautiful,1952) ou dans le monde fermé de Cinecittà de "Quinze jours ailleurs" (Two Weeks in Another Town,1962) avec Kirk Douglas et Edward G. Robinson. Rappelons aussi les groupes que constituent la clinique psychiatrique de "La Toile d'araignée" (The Cobweb,1955), ou bien le collège pour garçons de "Thé et Sympathie" (Tea and Sympathy,1956). 

Les comédies musicales de Minnelli ont fait l'objet de tant d'éloges qu'on a quelque peu tendance à oublier qu'il a réalisé aussi de nombreux films comiques. A partir du "Père de la mariée" (Father of the Bride,1950), ces films se consacrent aux différents aspects de la vie familiale et à la lutte entre les sexes : "Allons donc Papa !" (Father's Little Dividend,1951), une suite du "Père de la mariée", fut tournée dès l'année suivante grâce au succès du premier film, - "La Roulotte du plaisir" (The Long Long Trailer,1953) avec Lucille Ball et Desi Arnaz (le film fut un des plus gros succès du cinéaste, mais aussi des comédies produites par la MGM), "La Femme modèle" (Designing Woman,1957) et "Qu'est-ce que Maman comprend à l'amour ?" (The Reluctant Debutante,1958). En 1963, Minnelli réalisa "Il faut marier Papa" (The Courtship of Eddie's  Father), peut-être son meilleur film comique, histoire d'un jeune homme qui cherche une épouse pour son père devenu veuf.

Jusqu'en 1964, Minnelli travailla exclusivement pour la MGM. Apparemment du moins, il n'eut jamais à s'en plaindre. A la différence d'autres réalisateurs, il ne se sentit pas gêné par la pompe un peu surannée qu'avait adoptée la MGM. Ce style lui permit en effet de mener à bien ses expériences, sur l'emploi de la couleur par exemple, lorsqu'il réalisa "La Vie passionnée de Van Gogh" (Lust for Life,1956). En 1964, Minnelli tourna pour la 20th Century Fox, un film comique intitulé "Au revoir, Charlie" (Goodbye Charlie). Toujours fidèle à ses genres de prédilection et à son style, le cinéaste enchaîna avec une série de films qui furent mal accueillis, tant par la critique que par le public. "Au revoir, Charlie" fut suivi d'un film monté pour le couple Elizabeth Taylor-Richard Burton, "Le Chevalier des sables" (The Sandpiper,1965), et de deux comédies musicales interprétées par les nouvelles stars du genre : "Mélinda" (On a Clear Day You Can See Forever,1970) avec Barbara Streisand, et "Nina" (A Matter of Time,1976), avec sa fille Liza et Ingrid Bergman.

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L'oeuvre de Minnelli ne cesse de faire retour sur un certain nombre de thèmes. Le plus évident - et le plus fréquent - est celui du divorce entre le rêve et la réalité : tous ses personnages aspirent à la réalisation d'un rêve secret et vivent douloureusement cette quête, qu'ils soient amoureux ou artistes. Les films de Minnelli expriment la difficulté de concilier  la splendeur de l'idéal avec le prosaïsme du monde réel et quotidien. L'heureux dénouement, qui voit le rêve se réaliser ou le personnage accepter un compromis avec la grisaille de tous les jours, est trompeur : la nostalgie d'un monde idéal persiste, ce qui confère un arrière-goût amer à l'ensemble de l'oeuvre, même dans les plus pétillantes des comédies musicales. Il semble que l'effort nécessaire pour combler la brèche entre l'idéal et le quotidien soit impossible pour Minnelli; souvent, en effet, il se contente d'indiquer l'esquisse d'une solution, sans trop y croire. 

 

 

Autre thème, lié au précédent : celui de l'illusion et de la réalité. Sous de nombreux aspects, les films de Minnelli sont une méditation perpétuelle sur la nature impalpable de l'illusion et sur l'impossibilité d'établir avec certitude si telle ou telle chose est, ou non, "réelle". Ce thème apparaît de manière explicite dans les films traitant de la création artistique (qu'il s'agisse de théâtre, de cinéma ou de peinture). Minnelli ne s'attache pas à lever l'illusion qu'entretient l'art; il se contente plutôt d'observer les résultats paradoxaux de l'effort déployé pour faire coïncider l'imagination et la réalité. Dans "Le Pirate", Judy Garland dit à un moment donné : "Je sais qu'il y a un monde réel et un monde imaginaire, je saurais les reconnaître", bien que tout le film contredise cette certitude par ses enchevêtrements inextricables entre ces deux univers. Dans "Madame Bovary" (1949), avec Louis Jourdan et Jennifer Jones, on ne sait jamais si les rapports entre Emma et le beau Rodolphe relèvent d'une liaison bien banale, ou s'il s'agit, pour elle, d'un amour sincère, et pour lui, d'une simple passade. "Les Ensorcelés" met en scène un producteur de cinéma interprété par Kirk Douglas, dont la star jouée par Lana Turner, parvient à  donner le meilleur d'elle-même parce qu'il fait croire qu'il l'aime. En suscitant son amour, il l'amène à s'exprimer de façon "réaliste" à l'écran, si bien que les spectateurs ne distinguent plus l'amour "authentique" de l'amour simulé. Dans "Mélinda" où l'héroïne (Barbra Streisand) se rappelle sous hypnose sa vie passée, Minnelli ne laisse jamais entendre si ses souvenirs sont vrais, ou s'ils sont le fruit de son imagination fertile, voire le produit de la suggestion exercée sur elle par l'hypnotiseur (Yves Montand). Le problème du vrai et de ce qui ne l'est pas, le problème de l'illusion, restent sans réponse, peut-être parce qu'il n'y en a pas. 

Un troisième thème sert de corollaire à celui qui vient d'être exposé. Il s'agit de la nature du rôle des sexes. Toute l'oeuvre de Minnelli repose sur la conviction que les rôles de l'homme et de la femme ne sont pas "naturels", mais "sociaux". Et qu'ils sont donc, dans une certaine mesure, eux aussi des illusions. Cela ressort notamment dans le machisme parodique dont fait montre Gene Kelly dans "Le Pirate" et dans la féminité outrancière de Dolores Gray dans "Un étranger au paradis" (Kismet,1955) ou de Kay Kendall dans "Qu'est-ce que Maman comprend à l'amour ?" Parfois, ce thème devient le sujet même du film. L'affirmation de la virilité apparaît alors comme l'objet d'une conquête, conquête d'autant plus vaine qu'elle est chèrement payée sur le plan de l'affection comme dans "Thé ou sympathie", ou même en vies humaines comme dans "Celui par qui le scandale arrive". En matière de féminité, les films de Minnelli présentent souvent des archétypes inconciliables entre lesquels l'homme doit choisir : la vierge et la prostituée de "Comme un torrent", la blonde évaporée, la fille riche et sournoise ou tout simplement la voisine d' "Il faut marier Papa". Quel que soit son choix, l'homme ne pourra jamais conquérir entièrement une femme : car dans les films de Minnelli - à l'exception de ceux de Judy Garland - les femmes sont des êtres pleins de facettes. Outre l'intérêt pour l'artificielle répartition des rôles sexuels, l'oeuvre de Minnelli manifeste aussi une sympathie certaine pour les personnages ambigus, en marge : les jeunes hommes "féminins" comme John Kerr dans "Thé et sympathie" et George Hamilton "Celui par qui le scandale arrive" et "Quinze jours ailleurs", intérêt que l'on retrouve aussi dans le goût de Minnelli pour certaines actrices au tempérament désinvolte et indépendant, telles Garland, Lucille Ball, Lauren Bacall et Judy Holliday. 

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Dès les années 40, les critiques soulignèrent l'élégance des films de Minnelli, son goût pour la haute couture - voir le défilé de mannequins qu'il dirige dans "Les Rois de la couture" (Lovely to Look At,1952) de Mervyn LeRoy -et pour les décors raffinés. De toute évidence, Minnelli a le culte de la beauté, comme en témoigne son autobiographie "Tous en scène" (Editions Lattès); il était lui-même collectionneur de tableaux (on le voit d'ailleurs dans "Tous en scène"). Il est indéniable que bon nombre de ses films ont subi l'influence de peintres célèbres - Le réaliste américain Thomas Eakins pour "Le Chant du Missouri", Van Gogh pour la biographie de celui-ci et une pléiade d'artistes français de la fin du XIXe siècle dont Dufy, Renoir, Toulouse-Lautrec et le Douanier-Rousseau qui ont inspiré la chorégraphie finale de "Un Américain à Paris". Pourtant, cette prédilection pour la beauté et l'art à permis à certains d'accuser Minnelli de facilité. On a dit aussi qu'il était velléitaire, prétentieux et snob.

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A partir du milieu des années 50, la critique a évolué vis-à-vis du cinéma de Minnelli. Elle en a analysé les thèmes et les éléments stylistiques selon une perspective nouvelle. Pour certains critiques dont le meilleur fut Jean Domarchi, Minnelli utilisait les mouvements de caméra, la couleur, le montage et les décors pour exprimer sa vision artistique. Fond et forme ne font qu'un, ce qui est particulièrement patent dans "Celui par qui le scandale arrive". Ce film repose sur le conflit entre un homme qui n'est autre que Robert Mitchum et son épouse, incarnée par Eleanor Parker. Le "domaine" de l'homme est à son image : farouchement viril avec ses murs ocre et rouges, ses fauteuils de cuir, ses fusils et ses trophées de chasse. Le reste de la maison est typiquement féminin et reflète les goûts de la grande bourgeoisie : papiers et tentures sont de couleurs délicates. La femme elle-même porte des vêtements pastel qui s'accordent avec le cadre. L'habitation est donc nettement divisée en deux domaines antagonistes. Il en va de même pour la famille. L'emploi de la couleur, cependant, va plus loin encore. Il est lié à un symbolisme du sang présent dans tout le film. L'homme est un sanguin, un chasseur qui joue sans cesse avec la mort, tandis que sa femme arbore un visage exsangue. Leur fils (George Hamilton) est déchiré entre ces deux mondes qui s'affrontent devant lui.

Il arrive que le vernis de l'élégance et le raffinement de la narration ne puissent pas toujours dissimuler l'angoisse existentielle du visionnaire qu'est Minnelli. C'est comme si un excès d'émotivité et de désir frustré, désormais impossibles à contenir, se déchaînaient sous la forme de délirants mouvements de caméra, d'explosions de lumière et de couleurs, de musiques fracassantes et de montage frénétique. On pense, à ce sujet, à la folle course en voiture de la vedette dans "Les Ensorcelés", lorsque la star découvre qu'en réalité le producteur ne l'aime pas; à la chasse au sanglier dans "Celui par qui le scandale arrive" qui se répète à la fin du film, mais par une chasse à l'homme : le fils traque l'assassin de son père en suivant le même parcours; ou encore au moment culminant de "Comme un torrent" : la musique lancinante, les lumières vives qui clignotent, la foule frénétique d'un luna-park accompagnent l'homme qui voudrait tuer Dave Hirsch interprété par Frank Sinatra. Les éclairages au néon illuminent brutalement sa silhouette, véritable carroussel fantasmagorique d'éclairs et de lueurs aveuglants. Dans de pareils moments, un délire incontrôlable fait craquer la surface lisse et élégante : Minnelli hausse le ton et cela donne lieu à des résultats aussi exaltants que spectaculaires.  

Gene Kelly et Vincente Minnelli projettent de tourner les extérieurs en Ecosse de "Brigadoom" (1954). Des restrictions financières contraignent les producteurs à réaliser le film entièrement en studio, en Cinémascope. Pour Minnelli ce sera sa première confrontation avec l'écran large.  "Gigi" (1958) était un projet qui tenait à coeur au cinéaste ainsi qu'au producteur Arthur Freed, ce fut Maurice Chevalier, qui n'avait pu se rendre disponible pour "Un Américain à Paris", qui tint le rôle. Ce film fut récompensé de plusieurs Oscars dont celui de la mise en scène. Aussi splendide soit-il, "Un Américain à Paris", déplaira à certains pour le ballet final jugé prétentieux, s'inspirant de toiles célèbres des peintres de l'école de Paris (comme indiqué ci-dessus). Pourtant, il reste l'un des films les plus aboutis de Minnelli, soutenu par une merveilleuse distribution : Gene Kelly, Leslie Caron et Oscar Levant, la brillante partition de Gershwin et d'élégantes chorégraphies. Le brio naturel de Minnelli est encore plus manifeste dans "Tous en scène", d'une part parceque le cinéaste diverge de la "comédie musicale intégrée" à laquelle il a donné ses lettres de noblesse et, d'autre part, parce qu'il revient glorieusement à la revue théâtrale qu'il a voulu jadis détrôner, aux envoûtantes coulisses du spectacle. Parmi ses dernières comédies musicales, la meilleure est incontestablement "Gigi"  d'après l'ouvrage de Colette.

Homme sensible et intelligent, Minnelli n'avait pas la peau assez dure pour survivre à la jungle hollywoodienne. Bien qu'il soit resté plus de vingt ans à la MGM, il lui a fallu faire bien des concessions, par exemple attendre 1955 pour tourner un premier film dramatique en couleur, "La Toile d'araignée", ou se voir imposer le cinemascope. Mais Minnelli n'est pas suffisamment "armé" pour survivre hors de la MGM, qu'il quitte en 1963. Ses derniers films seront des échecs commerciaux. Triste dénouement pour un cinéaste aussi distingué. Plusieurs projets non aboutis, dont celui de tourner la vie de Zelda Fitzgerald, avec sa fille Liza Minnelli, qui commence en 1966, une carrière artistique (voir évocation en décembre 2018) qui la mènera jusqu'à "New York-New York" en passant par "Cabaret". En 1975-1976, il tourne en Italie "Nina" (inédit en France diffusé en 1978 sur France 3 anciennement FR3) avec Liza Minnelli et Ingrid Bergman d'après le roman de Maurice Druon "La Volupté d'être". En 1974, il a écrit un livre de souvenirs "I Remember It Well".  Vincente Minnelli décède le 25 juillet 1986 à l'âge de 83 ans à Beverly Hills (Etats-Unis).   

 

 

                                    Un petit coin aux cieux - 1942

          

         

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                                      Mademoiselle Ma Femme - 1943 

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                                        Le Chant du Missouri - 1944

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                                           L'Horloge - 1945

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Ziegfeld Follies (1946) – The Babbit and the Bromide – Fred Astaire and Gene Kelly

 

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UN AMERICAIN A PARIS - Bande Annonce Officielle (VOSTFR) - Gene Kelly / Vincente Minnelli

 

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                                       Préparation du tournage

 

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Les ensorcelés (1952) bande annonce

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At the cafe - The Band Wagon (1953, Vincente Minelli)

 

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Brigadoon (1954) Official Trailer - Gene Kelly, Van Johnson Musical HD

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                                              Nina - 1976

 

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*Affiches : Cinetom - Affichescine 

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