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CINETOM
29 septembre 2016

VICTOR FRANCEN, LE COCU MAGNIFIQUE !

             VICTOR FRANCEN          1888 - 1978

                  Comédien Belge

 

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Victor Franssen ou plutôt Victor Francen est né le 5 août 1888 à Tirlemont en Belgique. Ce comédien Belge était fils de commissaire de police, il poursuit ses études d'art dramatique au Conservatoire de Paris. Le dernier des tragédiens purs, Francen n'avait pas par hasard été l'élève de Paul Mounet au Conservatoire de Paris, en un temps où les emplois "sérieux" excluaient volontiers toute escapade dans quelque autre registre. Au reste, parmi la trentaine de films tournés entre 1921 et 1949, un seul, mémorable il est vrai : "Le Roi" (1936) de Pierre Colombier, ressortit à la comédie...

"Le dimanche 20 janvier 1918, j'assistai au spectacle régulier que donnait alors la Comédie de Genève : on jouait "Un beau mariage", comédie en trois actes de Sacha Guitry, et son principal interprète, que je n'avais encore jamais vu, s'appelait Victor Francen. Ce Belge d'origine avait débuté à Bruxelles en 1908, il n'avait paru à Paris que dans deux pièces : "L'Entraîneuse" de Charles Esquier au théâtre Antoine en juin 1913, et "Le Talion" d'Henry de Rothschild au théâtre Marigny au printemps de 1914. L'une et l'autre n'avaient eu qu'une courte carrière, mais on avait remarqué ce grand garçon blond qui physiquement rappelait un Lucien Guitry jeune (...) et qui jouait avec beaucoup d'esprit et une surprenante autorité pour ses vingt-neuf ans. Il est encore mieux dans les pièces dramatiques, me dit Fournier, le directeur de la Comédie, qui le prisait beaucoup. Il est ici pour toute la saison, il a paru dans un grand nombre de rôles très différents (...) et c'est dans "Le Scandale" d'Henry Bataille qu'il a surtout réussi. Il revient de Russie où jusqu'à la révolution de 1917, il était pensionnaire au théâtre Michel de Petrograd."

Le drame déjà, donc. Revenu à Paris, Victor Francen y connaît une gloire ininterrompue, qui le mène des "Mille et une nuits" mises en scène par Firmin Gémier au théâtre des Champs-Elysées (1920) aux pièces de Bernstein, qui écrit pour lui des drames mondains, "Espoir" par exemple "Gymnase" (1934) que Francen avouait détester malgré l'étendue de son succès personnel. Grand, le cheveu bientôt argenté lustre en arrière, l'oeil bleu et le collier de barbe distingué. Victor Francen ne connait pas, comme Blanchar ou Boyer, la ressource de rôles pétaradants, bondissants, qui lui permettent de changer d'emploi. Pas question, même au cinéma, de s'égarer d'un registre tracé dès ses débuts : en 1923 dans "La Neige sur les pas" d'après Henri Bordeaux, il avait comme partenaire le chanoine Pellouchoud et les frères de l'hospice du Grand-Saint Bernard...

Malheureusement pour lui, car la postérité est souvent injuste, Francen s'identifie avec une troublante perfection à la cinématographie académique impersonnelle et faussement "chic" des années trente : quelle différence, au fond, entre les drames militaires de Claude Farrère, "Veille d'armes" (1935) de Marcel L'Herbier et les noirceurs mondaines d'Henri Duvernois, "Après l'amour" (1931) de Léonce Perret, entre les pièces modernes d'Alfred Capus et les affrontements familiaux de Pierre Wolff, "Les Ailes brisées" (1933) d'André Berthomieu. Tout cela respire les mêmes fausses valeurs de dévouement frelaté et de cas de conscience fabriqués.

Dans "L'Aventurier" (1934) de Marcel L'Herbier, Victor Francen incarne Etienne Ranson, qui était à l'origine une comédie en quatre actes d'Alfred Capus. Curieusement à Victor Francen qui joue tout avec une froideur déchirée et parfois avec une distance salvatrice, on confie des intrigues très voisines où se retrouve souvent le thème éculé du père et du fils, de l'homme mûr et du rival juvénile, épris l'un et l'autre de la même femme : "L'Appel de la vie" (1937) de Georges Neveux, "La Vierge folle" (1938) d'Henri Diamant-Berger", "Le Voleur" (1933) de Maurice Tourneur. Une explication psychologique s'impose t'elle?. "La Porte du large" (1936) de Marcel L'Herbier s'inscrit dans un cycle exaltant l'armée française , de terre et de mer. Le cinéaste relate dans son autobiographie "La tête qui tourne" (Ed. Belfond,1979), un différend qui opposa Charles Spaak (co-scénariste) et Victor Francen, ce dernier menaçant de se "mettre en grève" (sic) sous prétexte que le scénario avantageait l'équipe de jeunes comédiens à son détriment. "Il me fallut, écrit L'Herbier, bien de la diplomatie et de l'amitié pour faire repartir le tournage", au prix de quelques ajustements de détail.

 Victor Francen est-il l'homme de la fidélité en toutes circonstances? y compris aussi bien sûr à certains metteurs en scène. A Abel Gance d'abord   , pour "La Fin du monde" (1930) et "J'accuse" (1937), où il harangue dans une scène célèbre les victimes de 14-18 : "Debout les morts". A Marcel L'Herbier surtout :  chez le metteur en scène comme chez l'interprète, même raideur empesée, même goût de l'effet et de l'effroi, même "distinction" empruntée et creuse. Sept films de "L'aventurier" à "La Révoltée" (1947) de L'Herbier, dont le meilleur demeure "Entente cordiale" (1939) toujours de Marcel L'Herbier, écrit par Steve Passeur et Abel Hermant et dans lequel le couple Gaby Morlay (Victoria) - Victor Francen (Edouard VII) déploie plus d'humour que l'aspect officiel de l'entreprise pouvait en laisser attendre.

Gaby Morlay et Victor Francen : deux comédiens égarés, deux fantaisistes peut-être, englués malgré eux dans l'amidon du sacrifice et des grands sentiments. Ils ne sont jamais plus inspirés que dans la comédie finement dialoguée, leur véritable domaine. Réunis en 1936 dans le merveilleux "Le Roi" adapté pour l'écran par Louis Verneuil. Victor Francen en roi de Cerdagne en goguette à Paris et Gaby Morlay en Youyou, "petite femme spirituelle, dominent de leur verve leurs glorieux partenaires Raimu, Elvire Popesco et même André Lefaur. Ce couple vedette préférait sans l'avouer les frasques cocasses de Flers et Caillavet aux ténébreuses fatalités de Berstein et Bataille. 

Pourtant Francen, à l'autre bout du spectre, pouvait éprouver sans ridicule le pathétique authentique, à condition que son metteur en scène manifestât quelque inspiration. Qu'on revoie sans émotion les superbes scènes entre Jouvet-Saint-Clair et Francen-Marny dans "La Fin du jour" (1938) de Julien Duvivier et Charles Spaak, l'un des films les plus cruels et les plus justes jamais consacrés aux acteurs. Cet homme trompé, amputé qu'est Marny fait résonner de véritables accents, ceux-là mêmes que Louis Verneuil avait pressentis vingt ans plus tôt.

Marié à une Américaine, Victor Francen amorça à partir de 1940 une durable carrière à Hollywood, que lui avait facilité son vieil ami Charles Boyer en l'introduisant à la Paramount pour "Par la porte d'or" (Hold Back the Dawn,1941) de Mitchell Leisen avec Olivia de Havilland, Paulette Goddard et Boyer lui-même. De cette quarantaine de films tournés par la RKO, la MGM et la Warner où il est sous contrat à partir de 1943, on rappelera "Passage to Marseille" (1944) de Michael Curtiz avec Humphrey Bogart et Michèle Morgan, "Le Masque de Dimitrios" (The Mask of Dimitrios,1944) de Jean Negulesco, "La Bête aux cinqs doigts" (The Beast With Five Fingers,1946) de Robert Florey, "Le Démon des Eaux-Troubles" (Hell and High Water,1954) de Samuel Fuller, "L'Adieux aux Armes" (A Farewell to Arms,1947) de Charles Vidor etc. Grand premier rôle en France, Victor Francen n'en occupe que des seconds au mieux en Amérique, mais cette insertion honorable vaut assez les tentatives sans lendemain de bien des jeunes premiers. 

Victor Francen, ou le cocu magnifique. L'altière figure de cet acteur comme on n'en fait heureusement plus rappelle en effet une succession sans faille de tragédies vengeresses et d'épouvantables mélodrames, tous synonymes d'accablants malheurs. Endurée stoïquement par la mâle résolution de Francen, cette kyrielle de coïncidences fatales et de coups du sort meurtriers fait aujourd'hui plutôt sourire, comme beaucoup de pièces d'Henry Bataille et d'Henry Bernstein. Avant son départ précipité pour Hollywood en 1940 commence pour lui une seconde carrière comme indiqué précédemment. Perdant son statut de vedette, il devient le Français type dans l'imagerie caricaturale de la capitale du cinéma. En retrouvant en 1948 le cinéaste de ses débuts, Marcel L'Herbier, il partage désormais ses activités entre la France et les Etats-Unis. Il meurt le 17 novembre 1978 dans sa propriété d'Aix-en-Provence. Sa grande distinction naturelle était un atout à une époque où le cinéma se complaisait dans le portrait de grandes figures héroïques. Mais la mode et la distanciation aidant, son jeu commencé à être dépassé. "Ringard pathétique" pour les uns, comédiens inspirés pour les autres. Victor Francen demeure une figure typique d'une forme d'interprétation aujourd'hui complètement tombée en désuétude.

De nombreux textes sont tirés de l'ouvrage "Noir&Blanc" de Olivier Barrot & Raymond Chirat, aux Editions Flammarion.

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                        1936                                                                    1937

 

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                          Par la porte d'or - 1941 de Mitchell Leisen

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                         La Bête à cinq doigts - 1946 de Robert Florey

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                                                    1947 

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                                                          1950

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                  Le Démon des Eaux-Troubles - 1954 de Samuel Fuller

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 Affiches : Affiches-cine - Cinemafrançais - Cinetom

 

 

___________________________Gene Tierney

 

 

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