NOËL ROQUEVERT, L'UN DES PLUS GRANDS SECONDS ROLES DU CINEMA FRANCAIS
NOEL ROQUEVERT 1892 - 1973
Comédien Français
Noël Roquevert est né le 18 décembre 1892 à Doué-la-Fontaine, près de Saumur dans le département du Maine et Loire, il est le fils des comédiens Auguste et Marie-Louise Bénévent. C'est d'ailleurs aux côtés de ses parents, qu'il débute dès son plus jeune âge à plusieurs figurations dont le fameux bébé de six mois dans "Le Bossu" monté par Auguste et Marie Bénévent
Noël Roquevert prétendait avoir joué avec le grand Max Linder dans "L'étroit mousquetaire", or le comédien situe cet évènement en octobre 1920, à Paris alors que la production est américaine et fut tourné en 1922 à Hollywood!
Après avoir été fantassin lors de la Première Guerre mondiale, honoré de la Croix de guerre, après cette douloureuse partie de sa vie, il se prépare à jouer dans différents théâtres parisiens. Roquevert a tant joué au théâtre (près de cent cinquante pièces) comme au cinéma, qu'il était excusable, des dizaines d'années plus tard, d'avoir oublié certains détails d'une carrière commencée sur les planches en 1897!
Dès 1934, Noël Roquevert ne cessera de tourner au cinéma sans cesser pour autant les scènes parisiennes. Il débute au cinéma officiellement dans le film de Robert Siodmak "Tumultes" (1931) où Charles Boyer, Florelle et Armand Bernard étaient les acteurs principaux. En 1934, il participe au tournage de "Liliom" (1934) de Fritz Lang. (en brigadier).Suivront "La Bandera" (1935) de Duvivier, "Tarass boulba" (1936) avec Harry Baur, "Marthe Richard au service de la France" (1937) de Raymond Bernard avec Edwige Feuillère, "Barnabé" (1938) d'Alexandre Esway avec Fernandel, "Entrée des artistes" (1938) de Marc Allégret avec Louis Jouvet (Roquevert est vigile).
(On peut citer les inspecteurs de police qui se fabriquent un uniforme passe-partout à partir d'une défroque civile. Le cinéma ne propose alors à l'artiste que des apparitions rapides et d'ailleurs saisissantes. On n'oublie pas, l'ayant vu quelques secondes, sa silhouette sèche, ses traits anguleux le léger strabisme qui rapproche ses yeux perçants. On garde dans l'oreille l'écho de son débit martelé, le tranchant de sa parole. On s'étonne de sa lenteur à conquérir l'écran.) (Les Excentriques du cinéma français de Raymond Chirat et Raymond Barrot aux Editions Henri Veyrier).
La guerre de 1939 le surprend alors qu'il joue des farces au Palais-royal. L'Occupation le fixe à Paris. Son étoile dès lors va briller de tout son éclat grâce, il faut le dire, à la Continental franco-allemande. La société, avisée, s'intéresse aux promesses du comédien, lui fait confiance. Sur les trente films qu'elle produit, Roquevert en interprète onze. De "Mam'zelle Bonaparte" (1941) de Maurice Tourneur au "Dernier sou" (1943) d'andré Cayatte. Dans le premier il donne du relief à l'ignominie d'un louche policier. Il tient la vedette dans le dernier en campant un gangster de médiocre envergure qui pratique l'escroquerie aux petites annonces.
Et, entre-temps : inspecteur plein de jactance à qui Raimu rabat le caquet dans "Les Inconnus dans la maison" (1941) d'Henri Decoin, pandore véhément "La symphonie fantastique" (1941) de Christian-Jaque, suspect trop évident pour être coupable dans "Picpus" (1942) de Richard Pottier, provincial en goguette titillé par le démon de midi "Vingt-cinq ans de bonheur" (1943) de René Jayet, avocat aux amples effets de manches "La Vie de plaisir" (1943) d'Albert Valentin, mari ridicule dans "Pierre et Jean" (1943) d'André Cayatte.
Il boîte, mais fait partie d'un consortium du crime dans "L'assassin habite au 21" d'Henri-Georges Clouzot. Bien qu'il lui manque un bras il peut écrire sous la dictée et gifler Ginette Leclerc dans "Le Corbeau" (1943) de Clouzot. Dans tous ses films et dans "Dernier atout" (1941) de Jacques Becker où il pétarade dans un rôle de policier imbécile, il démontre la netteté de ses compositions, son autorité et un goût pour la charge efficace qui le pousse à épaissir le trait de ses silhouettes. Il observe, compose et fait rire. Il pénètre de temps en temps par la petite porte dans les allées de l'Histoire. Sacha Guitry qui lui confie au théâtre le role du déménageur dans "N'écoutez pas mesdames", lui a proposé de figurer Fouché dans "Le destin fabuleux de Désirée Clary" (1941). Dans "Napoléon" (1954) de Sacha Guitry, Roquevert-Cambronne n'aura qu'un mot à dire.
Fidèle compagnon de "Du Guesclin" (1948) de Bernard La Tour, son personnage à d'émouvantes résonances, mais le film est un échec. En revanche "Fanfan la Tulipe" (1952) de Christian-Jaque triomphe. Son duo exceptionnel avec Gérard Philipe reste dans toutes les mémoires, leur duel sur le toît de l'auberge devenu une scène culte. Paraît-il qu'à peine arrivé sur le lieu du tournage, Roquevert aurait demandé à Gérard Philipe s'il avait vu les "lolos" de Gina Lollobrigida"...L'artiste se dépense dans un emploi de soudard qui rappelle -en moins hargneux mais en plus méchant -les compositions de James Finlayson (voir sur Cinetom), l'éternel ennemi de Laurel et Hardy.
Si le canotier personnifie Maurice Chevalier et le chapeau melon Pierre Larquey, le béret basque - le béret français! symbolise Roquevert. Les héros en pantoufle, les stratèges sur banquette de moleskine, les colonels Ranchonnot, les retraités virulents et les commerçants poujadistes ont été promptement épinglés, emballés et livrés frémissants dans les salles obscures. L'épicier concupiscent d' "Antoine et Antoinette" (1946) de Jacques Becker et le juré obtus de "Justice est faite" (1950) d'André Cayatte. Le voisin soupçonneux des "Diaboliques" (1954) d'Henri-Georges Clouzot avec Simone Signoret et Vera Clouzot et l'ancien résistant de "Marie-octobre" (1958) de Julien Duviver avec une pléiade d'acteurs en huis clos : Lino Ventura, Paul Guers, Serge Reggiani, Paul Meurisse, Paul Frankeur, Bernard Blier et Danielle Darrieux, tous s'alignent pour le jeu de massacre. Roquevert paraît et la scène bascule soudain, tant l'intérêt se concentre sur ce qu'il dit, sur ce qu'il fait.
On connaît tous ses gestes, on pressent toutes ses mimiques, on devine toutes ses intonations, car il tourne en moyenne huit films par an. Il amuse toujours. Pendant les années 50, il enchaînera différents films, pas tous égaux mais qui a permis d'amuser un public. Quoi qu'il en soit, Noël Roquevert aura diverti des générations de spectateurs qui, en l'applaudissant, prenaient leur revanche sur le propriétaire intraitable, l'adjudant sadique,le crémier arrogant et la baderne incurable. N'est-ce pas rien d'avoir servi d'exutoire à toute une population.? (Les Excentriques du cinéma français de Raymond Chirat et Raymond Barrot aux Editions Henri Veyrier).
Après "Les Diaboliques", on retiendra sur le plan cinématographique "Le Mouton à cinq pattes" (1954) d'Henri Verneuil avec Fernandel, "Madame Du Barry" (1954) de Christian-Jaque avec Martine Carol, "Le Dossier noir" (1955) d'André Cayatte avec Bernard Blier, "Nana" (1955) de Christian-Jaque.
Roquevert fut l'acteur des répliques comme celle donnée à Jean Gabin au bord d'une plage dans "Archimède le clochard" (1959) de Gilles Grangier, à Francis Blanche dans "Snobs" (1961) de Jean-Pierre Mocky, de Belmondo dans "Cartouche" (1962) de Philippe de Broca, de Gabin et Belmondo dans "Un singe en hiver"(1962) d'Henri Verneuil oui Louis de Funès dans "Le Diable et les Dix commandements" (1962) film à sketches de Duvivier.
C'est en 1972 que Noël Roquevert tourna son dernier film sous la direction de Pierre Tchernia dans "Le Viager" en incarnant le patriarche de la famille Gallipeau, bénéficiaire du viager. ("Le drame du bonhomme, c'est qu'il a un coeur d'or et joue les traîtres. La nature inéluctable lui ayant fait l'orbite cave, le sourcil échevelé, un long triste nez, un menton abrupt, une verrue insolente sur la joue et, à certains moments, le regard torve (comment croire à la droiture de pensée d'un être dont le regard dévie?). Guitry le définissait comme "un comédien-né, véridique, sensible, direct, sans défaut, sans travers, sans truc, inestimable". Bel éloge d'un acteur dont le talent fut trop souvent confiné à la caricature de l'éternel représantant de l'ordre, rouspeteur en béret basque, à la manière de ces "héros en pantoufles, stratèges sur banquettes de moleskine (...) (Les Excentriques du cinéma français de Raymond Chirat et Raymond Barrot aux Editions Henri Veyrier).
Noël Roquevert décéda à Douarnez le 6 décembre 1973 à l'aube de ses 81 ans. Il avait eu trois passions dans sa vie : son métier, la chasse et sa femme, Paulette Noiseux, comédienne auprès de laquelle il vécut quarante-cinq and et dont la disparition précèda de peu la sienne, un suicide discret.
__________A SUIVRE TOUT PROCHAINEMENT_______________
JOYEUX NOEL