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4 février 2018

ANDRE LUGUET, ÉLÉGANCE, HUMOUR ET DISTINCTION

                  ANDRE LUGUET           1893  - 1971

                    Comédien & Acteur Français

   

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Comédien français né André Allioux-Luguet dans une famille de comédiens, le 15 mai 1892 à Fontenay-sous-Bois. Sa mère se déplaçant beaucoup, il commence ses études en France et les finit en Grande-Bretagne, au Graven College de Beckenham. Parfaitement billingue, il débute sur les planches d'un théâtre londonien, puis étudie l'art dramatique au Conservatoire de Paris. Ses premières prestations au cinéma datent d'avant la Première Guerre mondiale.

André Luguet imposera un commun dénominateur : l'élégance - élégant Luguet. Avec cela un air confortable. André Luguet, c'est le sportif qui, au sortir de la douche, revêt un smoking pour assurer ses conquêtes. C'est aussi le macho quittant le fumoir pour entrer au boudoir. Brun, le regard velouté, la moustache stricte, la distinction de la parole corrige le malice de l'oeil. Ainsi apparaît-il, heureux de son existence et prompt à conter fleurette.

Imperturbable, il a enseigné pendant cinquante-huit ans l'art de vieillir avec tact sous les herses et sous les sunlights. De "L'âme au violon" (1911) de Léonce Perret à "La Maison de campagne" (1969) de Jean Girault avec Danielle Darrieux, il a démontré que son talent rehaussait encore le prestige de la dynastie des Luguet vouée au corps et bien aux arts du spectacle. Le jeune homme pouvait-il échapper à sa destinée?. Prudente, la famille s'éloigne de la boîte du souffleur.

L'Angleterre lui offre un splendide isolement. Il y part et en revient, l'atavisme ne perdant pas ses droits nanti de quelques connaissances pratiques, mais ayant acquis surtout la maîtrise de la langue et assimilé le chic britannique. Dorénanant et constamment l'odeur du tabac blond et du cuir anglais va nimber le néophyte qui pénètre chez Gaumont.

André Luguet se retrouve, sous l'emblème de la marguerite, en proie à "Fantomas" (1912). Mais Feuillade, qui dispose pour son arc de nombreuses cordes, l'emploie dans des films dont les titres évoquent les images de missel, aux gravures délicates, encadrées de dentelles "Les cloches de Pâques" (1912), "Le Ménestrel de la reine Anne" (1913). Léonce Perret donne plutôt dans le tableau galant "L'espalier de la marquise" (1912) et Henri Fescourt qui s'en mêle, dans la miniature "Peine d'amour" (1914).

Luguet survole la Grande Guerre en aéroplane. L'expérience le marque. Il retrouvera toujours avec plaisir la camaraderie des camps et en nourrira une douce nostalgie. Aussi bien dans "Alexis gentleman chauffeur" (1937) de Max de Vaucorbeil dont il écrit le scénario, que dans "La Patronne" issu d'une comédie qu'il a signée. Et "Gloria" (1931) de Hans Behrendt, "L'escadrille de la chance" (1937) de Vaucorbeil, "L'avion de minuit" (1938) de Dimitri Kirsanoff participent du mieux qu'ils peuvent, à ces carrousels aériens. 

Sans encombre, il atterit dans le Paris des années folles. Sans retenue, il s'abandonne aux délires boulevardier. Il compose avec dextérité des cocktails de charme et d'humour en l'honneur de Donnay, de Deval ou de Géraldy. Son brio et son doigté alertent la Comédie-Française qui les fait les yeux doux. En 1925, il pénètre dans le Temple, très à l'aise. Il en sort avec fracas, à demi asphyxié, peu d'années après.

Le cinéma de l'époque semble moins l'intéresser, même s'il figure parmi "Les Cinq gentlemen maudits" (1920) de Luitz-Morat même s'il s'agit dans les courtes pochades de Pière Colombier, -c'est pourtant en 1925 qu'il devient réalisateur. Curieusement "Pour régner" est une sombre histoire. Autour d'un trône pseudo-balkanique, deux frères titrés se disputent une princesse. La critique enregistra poliment un succès d'estime. Aux Etas-Unis André Luguet dirigea des versions françaises plus amusantes : en 1930 "Monsieur Le Fox" et "Le Bluffeur", qu'il écrit, réalise, interprété et monte lui-même). Seule la personnalité manque, l'organisation américaine ne la tolérant pas.

Comme une tache d'huile, le sonore et parlant s'étend. Luguet ne résiste pas à l'appel des sirènes d'Outre-Atlantique. Il franchit la Grande Mare. Affable, mais attentif à ses contrats, il tourne à un bon rythme, tantôt chez Mayer, tantôt chez Warner. Productions strictement américaines ou remakes traduits par des Européens "Buster se marie" (1931) de Claude Autant-Lara; "Jenny Lind" (1931) et "Quand on est belle" (1931) d'Arthur Robinson. "Le Spectre vert" (1931) de Jacques Feyder, son brouillard, ses policiers, sa mystérieuse héroïne séduisent le public et Luguet s'y montre sémillant à souhait. Ce drame angoissant exaspère la Comédie-Française qui ne peut admettre la présence de l'insoumis dans un film parlant. Peut-elle s'opposer à la projection en France ? Maître Campinchi tranche : M. Luguet étant à Hollywood, on pourra cependant entendre sa voix dans tous les cinémas de Paris. Le cas n'a évidemment pas été prévu en 1812. Et il n'y a aucune clause au sujet du film parlant dans le décret de Moscou..."

Tout s'arrange - même mal - avec le Français. L'acteur rallie Paris et collectionne les comédies frêles, oubliées le temps du vestiaire. Répertoire qui convient à celui qui écrit : "La vérité au théâtre n'existe pas. Il s'agit simplement d'y faire croire. Mais tout est mensonge puisque nous exprimons des sentiments que nous ne ressentons pas vraiment. Un bon acteur est un illusionniste adroit."

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Fantaisiste de bon aloi et acteur avisé", il n'oublie pas que l'écran s'allume sitôt le rideau de scène fermé "La Poule" (1932) de René Guissart, "Une Faible femme" (1932) de Vaucorbeil, "Il était une fois" (1933) de Léonce Perret, "Le Monde où l'on s'ennuie" (1934) de Jean de Marguenat, "Bourrachon" (1935) de Guissart, "Jeanne" (1935) de Georges Marret, "Les Amants terribles" (1936) de Marc Allégret. Il s'accomode des conventions qui poudrent ses personnages. "Il est sûr, remarque-t'il que lorsque le public a adopté un acteur sous un certain angle, il est bien difficile à cet acteur de se métamorphoser car même lorsqu'il y parvient, on lui pardonne mal de ne plus être tout à fait le type que l'on attendait."

Il incarne avec le naturel qu'exigent les planches les messieurs de parfaite correction, bien élevés et perspicaces qui circulent entre "Jeunes filles en détresse" (1939) de G.W. Pabst et "Le Collier de chanvre (1940) de Léon Mathot. Dans "Battement de coeur" (1939) de Henri Decoin, il trace une éblouissante caricature de diplomate trompé, mais clairvoyant qui, sans, se départir du self contrôl et d'un tic nasal, fourre Danielle Darrieux dans une romanesque aventure.

La Seconde Guerre allait proclamer définitivement Luguet roi des boulevardiers. André Luguet approche de la cinquantaine : il devient le séducteur aux tempes grisonnantes. Treize rôles à l'écran : galant séducteur, il se prodigue auprès de "Mademoiselle Béatrice" (1942) de Vaucorbeil. Il participe à la folie de  bon ton qui règne dans "Boléro" (1941), éternue avec grâce sous le parapluie de "L'Inévitable Monsieur Dubois" (1942) de Pierre Billon. Surtout, il s'évertue à colorer de nuances neuves des silhouettes similaires et à tirer du jeu son épingle à cravate "L'Honorable Catherine" (1942) de Marcel L'Herbier, "Arlette et l'amour" (1943) de Robert Vernay, "Florence est folle" (1944) de Georges Lacombe, "Mademoiselle X" (1944) de Billon.

Alerte malgré ses rhumatismes, monoclé et galonné, il hasarde un doigt de cours à l'espiègle Chiffon. Son coeur pris au piège, l'intrépide colonel comprend un peu tard qu'il n'est plus lieutenant. Le sourire désabusé et le coeur pincé, il ne lui reste plus qu'à humer la nostalgie comme une touffe de violettes. André Luguet, mélancolique gradé du "Mariage de Chiffon" (1941) de Claude Autant-Lara, gagne son combat haut la main. Il regrettera pendant vingt-cinq ans le képi, le dolman et le stick, alors qu'il s'empêtre de plus en plus dans les stéréotypes et qu'il joue de plus en plus machinalement - à la façon de Fernand Gravey auquel il ressemble sur plus d'un point.

Après la guerre, il se fait plus rare au cinéma, son jeu étant ancré dans une tradition qui n'est plus à la mode. Il pert son statut de vedette mais conserve un emploi régulier de second plan, la plupart du temps dans la comédie. Il distribue des images convenues de sa propre personne dans la production de Michel Boisrond "C'est arrivé à Aden, Lorsque l'enfant paraît,1956); "Une Parisienne" (1957), "Faibles femmes" (1958), "Comment épouser un Premier ministre" (1964), sucreries agréables de courtes consommation. "Madame du Barry" le sacre roi de France. Etonnant Louis le bien aimé, sorti de son cadre doré grâce à Christian-Jaque et Henri Jeanson, bienveillant sous la perruque à rouleaux, plus proche du roi d'Yvetot que du descendant des Bourbons. Au fil des années, il a mis au point des effets de théâtre qui gênent sur l'écran : les répliques essentielles qu'on martelle, l'oeil exorbité, la bouche arrondie, la narine palpitante, le jeu de la pipe, de la canne ou de l'éternel parapluie. Qu'en reste-t'il? Du vent frivolent sur des titres fanés. Il faut préciser que les souffles émanant de Preston Sturges "Les Carnets du Major Thomson" (1955) ou de John Huston "Les Racines du ciel" (Roots of Heaven,1958) ne sont guère plus revigorants. L'un de ses derniers rôles marquants sera, aux côtés de Brigitte Bardot, celui du très britannique sur Réginald Dumfrey, chef des services de sécurité de l'Amirauté, dans "Une Ravissante idiote" (1964) de Molinaro. 

André Luguet se fige en sa statue. C'est l'homme d'un autre âge qui savoure les douceurs de la vie après les avoir parsemées d'humour. Le 25 mai 1959, par exemple, Georges Van Parys relate dans son journal : "Reçu cette carte d'invitation. André Luguet vous prie de lui faire l'honneur d 'assister au dernier essayage de son 250ème costume Larsen. Au cours d'une cérémonie solennelle (mais intime) qui aura lieu le mardi 2 juin Pierre Larsen lui remettea ce costume spécialement exécuté et coupé pour la circonstance. Cocktail, 7 rue de la Boétie, 18 à 20h." Que n'a-t'il incarné le beau Brummel?

Fidèle à une image qu'il s'est imposée, le comédien réserve pourtant ses faveurs à la scène qui lui permet parfois de renouveler "Les Mains sales" de Sartre. "L'acteur de cinéma, a-t'il écrit, n'est qu'une valeur boursière gonflée par la spéculation et que le moindre krack peut ruiner en quelques mètres de pellicule." Plus loin, il ajoute avec cette pointe de mélancolie dont il aimait à se parer, ces lignes qui pourraient servir d'exergue à notre volume : "Au cinéma, les étoiles naissent, brillent et meurent à un rythme encore plus accéléré qu'au théâtre et l'on n'accorde pas à leur fragile scintillement plus de survie qu'au passage dans le ciel d'une poussière de comète...  Sentant sa carrière décliner, il à l'élégance de se retirer à temps. Il prit se retraite en 1972 et finit ses jours sur la Côté d'Azur, dans sa propriété de Cannes où il mourra le 23 mai 1979. Longtemps président du Syndicat des Acteurs, il était aussi l'auteur d'un livre de souvenirs intitulé "Le Feu Sacré" dans lequel il se montrait sans illusion sur son métier... 

*Ecrits de Olivier Barrot & Raymond Chirat (Noir&Blanc) Editions Flammarion

 

 

Ses Meilleurs films

* Jewel Robbery de William Dieterle

*Samson de Maurice Tourneur

*La Dame de Pique de Fédor Ozep

*Battement de coeur de Henri Decoin

*Le Dernier des Six de Georges Lacombe et Clouzot

*Le Mariage de Chiffon de Claude Autant-Lara

*L'Honorable Catherine de Georges Lampin

*Au Petit Bonheur de Marcel L'Herbier

*Les Amoureux de Marianne de Jean Stelli

*Madame Du Barry de Christian-Jaque

*Une parisienne de Michel Boisrond

*Les Racines du Ciel de John Huston

*Comment réussir en Amour? de Michel Boisrond

*Une Ravissante idiote de Edouard Molinaro

*Un Monsieur de compagnie de Philippe de Broca

*La Prisonnière de Henri-Georges Clouzot

                                                                               

                                                                                                   1913 

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Madame du Barry - 1954

        

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* Affiches : Cinémafrançais /Affiches-cine.com

 

 

____________________________________Leslie Howard

 

 

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