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CINETOM
28 avril 2010

JEAN VIGO, LE RIMBAUD DU CINÉMA FRANÇAIS

                   JEAN VIGO              1905 -1934    

                   Cinéaste  Français

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L'oeuvre de Jean Vigo se réduit à quatre films ; elle est pourtant d'une telle nouveauté, face à la production du cinéma français des années 30, qu'elle fait de son auteur un maître, mais aussi un précurseur.

 

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Jean Vigo est né à Paris le 24 avril 1905, il est le fils d'un couple de militants anarchistes, Emily Clero et Eugène Bonaventure de Vigo. Ce dernier est un journaliste libertaire connu. Il est l'un des cofondateurs de l'hebdomadaire "La Guerre sociale", en 1906, et signe ses articles Miguel Almereyda. Il emmène volontiers l'enfant dans ses réunions politiques - tous deux seront ainsi témoins de l'assassinat de Jean Jaurès au café du Croissant, rue Montmartre dans le 2ème à Paris.vigo3

Le jeune garçon garçon connaît une existence un peu bousculée, mais libre, qui le marquera profondément, et lui donnera de bonne heure le goût de la révolte. Sonpère a fondé, fin 1913, un hebdomadaire satirique, "Le Bonnet rouge", devenu peu après un quotidien. Mais le journal connaît des difficultés financières qui amènent Almereyda à composer. Il perçoit ainsi des "fonds secrets" du ministre de l'Intérieur Malvy. Cela causera sa perte : dénoncé, en juillet 1917, par Clémenceau, compromis par des fréquentations douteuses, le père de Vigo est accusé d'espionnage, de menées "défaitistes", et incarcéré en août.  Il meurt à Fresnes, dans la nuit du 13 au 14 août. L'enquête officielle conclut, bien entendu au suicide....

Jean Vigo part pour Montpellier, où il est accueilli par des parents, les Aubès : Gabriel (l'ancien mari de la mère d'Almereyda) et Antoinette, sa nièce. Ils l'inscrivent sous le nom d'emprunt de Jean Salles, au collège de Nîmes,  puis à celui de Millau, où il sera pensionnaire de 1919 à 1922. Ce sont des années plus mornes que vraiment sombres. Gabriel Aubès, photographe de profession, l'initie par ailleurs au monde des images.

En 1922, il s'inscrit au lycée de Chartres, pour être plus près de sa mère; il redevient à cette occasion "Jean Vigo". Bachelier, il s'inscrit à la Sorbonne, mais une maladie le contraint à plusieurs séjours au sanatorium de Font-Romeu, dans les Pyrénées. Il y rencontre une jeune polonaise, Elizabeth Lozinska "Lydou", qu'il épouse en janvier 1929. En raison deleur santé, ils se sont installés à Nice, où Vigo travaille comme assistant opérateur aux studios de la Victorine : il y a été engagé grâce à Claude Autant-Lara.

Il cherche toutefois à faire oeuvre personnelle. L'aide financière de son beau-père lui permet de faire l'acquisition d'une caméra. Il  rencontre également l'opérateur Boris Kaufman. Celui-ci est le frère du cinéaste soviétique Dziga Vertov, et l'influence de ce dernier est perceptible dans le court métrage qui marque l'accession de Vigo à la réalisation : "A PROPOS DE NICE" (1929)vigo_jean_nice

Kaufman et Vigo effectuent les prises de vues dans la ville, de fin 1929 à mars 1930. Le montage est achevé fin avril, et la première projection publique a lieu le 28 mai à Paris, au Vieux Colombier. Le sous-titre de l'oeuvre en définit les intentions : "un point de vue documenté". Le genre rassurant du documentaire y est totalement subverti : Vigo part de clichés familiers (le carnaval, les casinos, la Promenade des Anglais...) qu'il oppose à la triste réalité des quartiers pauvres de la ville. Des images violemment satiriques, d'allure surréaliste (pieds nus que l'on cire, femme fumant une cigarette et soudain dénudée...) se mêlent aux évocations des lieux de plaisir pour en dénoncer l'opulence égoïste.18820337L

Vigo définira sa conception du cinéma "social" dans un texte de présentation : "le but sera atteint si l'on parvient à révéler la raison cachée d'un geste, à extraire d'une personne banale et de hasard sa beauté intérieure ou sa caricature, si l'on parvient  à révéler l'esprit d'une collectivité d'après une de ses  manifestations purement physiques. Et cela, avec une force telle, que désormais le monde qu'autrefois nous côtoyions avec indifférence, s'offre à nous, malgré lui au-delà de ses apparences. Ce documentaire social doit nous dessiller les yeux.

Il se rend aussi à Paris pour assurer la distribution commerciale du film, qui sera programmé au Studio des Ursulines. En septembre 1930, il lance à Nice un ciné-club, les Amis du Cinéma, qui programmera Dovjenko, Eisenstein, Joris Ivens, Jean Grémillon, Jacques Feyder et bien d'autres...

Au cours d'un voyage à Bruxelles, pour y présenter "A propos de Nice" au II ème Congrès du cinéma indépendant, il fait la connaissance d'Ivens et d'Henri Storck, ainsi que celle de Germaine Dulac. Celle-ci lui passe commande d'un court métrage pour la série "Le Journal vivanté" patronnée par la firme dont elle est directrice. En janvier 1931, Vigo tourne donc "TARIS, CHAMPION DE NATATION" (1930), consacré au célèbre nageur.  Ce n'est pas qu'une oeuvre de circonstance : de très belles prises de vues sous-marines, en particulier, y annoncent déjà la "poésie de l'eau" de "L'Atalante".l_ata3

Cette commande n'est toutefois suvie d'aucune autre. Revenu à nice, Vigo est sans travail et connaît la gêne. Il lui faudra ainsi revendre sa caméra. Aucun des projets qu'il élabore ne pourra se réaliser. Lydou vient de donner naissance à leur fille Luce, et la situation de la famille est précaire. 1931 et 1932 se passent en vaines tentatives,malgré de fréquents voyages à Paris.

Toutefois le comédien René Lefèvre (le futur interprète du "Crime de Monsieur Lange" de Renoir), fervent admirateur de Vigo, le recommande à Jacques-Louis Nounez, homme d'affaires tenté par le cinéma. Celui-ci s'installe à Paris, travaille d'abord à un film sur la Camargue, puis, le projet une fois abandonné, fait accepter un scénario sur la vie des collégiens, provisoirement intitulé "Les Cancres". Un accord de coproduction avec la Gaumont-Franco-Aubert Film permet le financement du film, dont le tournage commence aux Buttes-Chaumont fin décembre 1932. Vigo vient d'adhérer à l'Association des écrivains et artistes révolutionnaires, très liée au parti communiste français.

Le tournage de ce qui deviendra "ZERO DE CONDUITE" (1933) est perturbé par la maladie de Vigo, ainsi que par de très mauvaises conditions atmosphériques, ne se fait pas sans difficultés. Il s'achève fin janvier 1933. Vigo assure lui-même le montage du film, pour lequel Maurice Jaubert compose un accompagnement musical remarquable. Mais le sort s'acharne contre le film : projeté en avril, au cours d'une séance privée réservée aux exploitants, qui l'accueillent avec hostilité, il est ensuite condamné par la commission de censure, qui lui refuse le visa d'exploitation. Il ne sera pas visible, en dehors du circuit des ciné-clubs, avant 1945.zero012

"Zéro de Conduite" décrit la rébellion des élèves d'un lycée de province contre les autorités, est très nettement inspiré des propres souvenirs d'adolescence du cinéaste. " Ce film est tellement ma vie de gosse que j'ai hâte de faire autre chose" déclara-t'il en cours de tournage, et il a donné à deux de ses héros (Bruel et Caussat) les noms de deux de ses camarades de classe de l'époque de Millau. Cependant, il faut se garder d'identifier l'oeuvre elle-même et son matériau de base. Elle n'est plus un simple "point de vue documenté" sur la vie des collèges. Peu soucieuse de réalisme, elle accumule les détails insolites (le Principal est un nain, un des surveillant imite Charlot et marche sur les mains), et exalte l'esprit de révolte qui n'est jamais vraiment située et qui est celle de l'esprit d'enfance contre tous les carcans. Cela explique peut-être qu'elle ait gardé tout son impact, qu'accentuent un humour très noir et d'admirables trouvailles de mise en scène, comme la bataille de polochons filmée au ralenti.

L'interdiction du film représente quand même un coup très dur pour Jean Vigo et son producteur. Mais celui-ci continue à lui faire confiance. Il déclare à un ami du cinéaste : "Vigo a beaucoup de talent, et je vois ce qu'il faut pour lui. Il faut lui donner un scénario vraiment très anodin; alors là il va se dépenser avec tout son génie mais la censure ne pourra pas intervenir. Et c'est ce que je vais faire. J'ai un scénario pour lui, ça s'appelle "L'ATALANTE" (1934), je vais lui donner."

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Le cinéaste est d'abord peu enthousiamé par ce qu'il appelle "un scénario pour patronage", mais il voit vite l'intérêt que représente une histoire-pretexte (le patron d'une péniche épouse une jeune femme qui, vite lassée de sa vie monotone, le quitte; mais il finit par la retrouver).

Il contacte  Georges Simenon pour les repérages, s'assure le concours de Michel Simon, et travaille activement au découpage. Le tournage a lieu de novembre 1933 à janvier 1934. L'hiver est très dur et la santé de Vigo sera fortement ébranlée. Il est si malade qu'il ne peut superviser le montage, ni défendre son film, de nouveau mal accueilli par les exploitants. Les distributeurs ont l'idée d'intégrer à l'oeuvre une rengaine à succès, "Le Chaland qui passe", et de la rebaptiser ainsi...Nounez doit s'incliner, Vigo est trop gravement atteint pour pouvoir protester. Il meurt de septicémie le 5 octobre 1934, alors même que le film, sorti en septembre, a déjà été retiré de l'affiche.

C'est pourtant un chef-d'oeuvre. Il est frapper de constater à quel point Vigo a su métamorphoser une intrigue de roman-photo en poème d'amour fou. Il a tiré parti précisément des conventions et du manque de structure du scénario de Jean Guinée, le rythme est plus lent, les évènements se succèdent plus qu'ils ne se suivent. Mais le film est imprégné de ce qu'on pourrait appeler une "poésie de l'élémentaire", qui naît des choses mêmes, décrites dans leur simple nudité. Le mariage du début, filmé de façon très réaliste, est ainsi, peu à peu, investi par le fantastique (la mariée en blanc sur la péniche). Les décors et les lieux ont une présence inquiétante qui est celle du rêve. Le film oppose le monde de l'eau, espace de liberté, au monde de la ville, inhumain et faux.

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Dita Parlo et Jean Vigo sur le tournage de "L'Atalante"

Jean Dasté

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Le bateau est un lieu clos , à l'écart du temps, sur lequel règne l'extraordinaire père Jules, l'une des plus grandes compositions de Michel Simon. Univers paisible et heureus, que menace le monde extérieur, symbolisé par un pitoyable camelot tentateur. On voit que la structure de "Zéro de Conduite" est à la fois reprise et inversée, et la révolte est dans "L'Atalante", intériorisée. Au jeu de massacre succède un combat douloureux, à des adversaires grotesques un monde redoutable parce qu'indifférent. Et la narration, dépouillée, privilégie, aux objets, aux regards. Dépassant (ou plutôt intégrant) les apparences, le réalisme du film atteint à l'essentiel.

L'auteur de "L'Atalante" apparaît dans l'histoire du cinéma, comme un isolé. On a vu dans le "réalisme poétique" à la Carné, dans le néo-réalisme italien ou la "nouvelle vague" autant de "descendants" de son oeuvre, mais cette opinion ne s'appuie que sur des ressemblances parfois forfuites, et Vigo demeure , par son exigence, un modèle aussi fascinant que lointain.          

 

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* 7 mai 2010 - Micheline Presle   (1ère partie)

*10 mai 2010 - Micheline Presle (2ème partie)

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Des erreurs. Qui a créé ce site. Merci de me répondre: luce.vigo@orange;fr, ou sur facebook. Merci<br /> <br /> Luce Vigo
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