SHELLEY WINTERS, UNE SACRÉE FEMME
SHELLEY WINTERS 1920 - 2006
Actrice Américaine
Shirley Schrift, plus connue sous le nom de Shelley Winters est née le 18 août 1920 à St-Louis (Missouri). Installéee à New York avec ses parents. Elle est encore à l'école quand elle débute sur les planches, en amateur, tout en gagnant déjà sa vie comme mannequin et en travaillant comme vendeuse dans un grand magasin. A force de volonté, elle obtient des petits rôles dans des comédies à Broadway où elle est remarquée par Harry Cohn qui la prend sous contrat, en 1943 à la Columbia.
A Hollywood, Elle sera transformée selon les critères de "l'usine de rêve"; "sa fiche signalitique" précise : "Les cheveux sont un peu trop foncés, et trop bouclés. Nous prévoyons de les faire plus blonds et lisses. Son front est trop bas,, on va arranger cela par électrolyse. Les yeux "tombent" un peu, le nez est trop large, les lèvres trop fines, les dents sont irrégulières, les épaules trop fortes, la poitrine trop plate, la taille n'est pas assez fine, les hanches trop généreuses, les genoux cagneux, la démarche trop hésitante, et il faut travailler sa voix." Ces transformations effectuées, on ne lui donne guère sa chance. Elle doit se contenter d'apparaître dans diverses productions du genre de "Aladin et la lampe merveilleuse" (A Thousand And One Nights,1945) d'Alfred E. Green, où elle est une fille de harem!
Son but étant de réussir comme comédienne, elle comprend qu'elle doit revenir au théâtre, même si on a fini par lui confier le rôle intéressant de la maîtresse de Ronald Colman dans "Othello" (A Double Life,1948) de George Cukor : elle est une jeune serveuse séduite par une vedette "sur le retour", perturbée mentalement, qui finira par la tuer. Mais son contrat à la Columbia lui interdit de retourner à New York. Or, cette petite compagnie désire faire d'elle une "bombshell", une "nana sexy bien blonde" qui ferait concurrence à Lana Turner. "Othello" est un film noir dans lequel elle est martyrisée. Cette définition séduit les autres studios, qui vont l'emprunter à la Columbia.
Shelley Winters tourne donc en 1949 pour Paramount dans "Le Prix du silence" d'Elliott Nugent et dans "Une Place au soleil" (A Place in The Sun,1951) de George Stevens avec Montgomery Clift et Elisabeth Taylor, qui lui vaut une nomination à l'Oscar. C'est ensuite la MGM qui lui confie un autre rôle important dans "La Tour des ambitieux" (Executive Suite,1954) de Robert Wise aux côtés de Fredric March, William Holden et Barbara Stanwyck.
Sa liaison orageuse, puis son mariage avec l'acteur italien Vittorio Gassman, en 1952 compromettent gravement sa carrière à Hollywood, elle fut déjà mariée de 1943 à 1948 à un commerçant. Mais on reconnaît désormais son talent de comédienne. Le rêve de la Columbia est oublié. United Artists lui fait touner, sous la direction de son ami Charles Laughton, "La Nuit du chasseur" (The Night Of the Hunter,1955), où elle succombe sous le charme d'un pasteur fou incarné par Robert Mitchum, film qui deviendra culte pour les cinéphiles. La même année, on la retrouve dans "Le Grand couteau" (The Big Knife), réalisé par Robert Aldrich, avec Jack Palance, Ida Lupino et Rod Steiger, elle tient le rôle d'une petite actrice dont le sort final est peu enviable. Elle revient ensuite au théâtre, pour quelque temps. Seul George Stevens réussit à l'en détacher en 1959, il lui propose le rôle de la mère dans "Le Journal d'Anne Frank" (The Diary Of Anne Frank); son interprétation lui vaudra une nouvelle nomination à l'Oscar. Dès lors, Shelley Winters se spécialise dans les rôles de mère, mais pas toujours très respectables.
Trois films en noir et blanc la confirment dans sa position de comédienne de talent : "Le Temps du châtiment" (The Young Savages,1961) de John Frankenheimer, "Lolita" (1962) de Stanley Kubrick et "Un Coin de ciel bleu" (A Patch of Blue,1965) de Guy Green, qui lui vaut une autre nomination à l'Oscar. Cette réputation est d'autant plus justifiée que l'actrice, à présent considérée comme une star établie, joue régulièrement avec la troupe du "Group Theatre" de New York. On applaudit ses performances dans des pièces comme "Un Tramway nommé désir" et "La Nuit de l'iguane" de Tennessee Williams ou "Deux sur la balançoire" de William Gibson. Elle amuse également en donnant la réplique aux Marx Brothers dans la pièce "Minnie's Boys'.
Shelley Winters ne se laisse pas enfermer dans l'époque où elle connut la gloire, évitant de tourner avec des réalisateurs "dinosaures" et donnant leur chance à de nouveaux venus : dans les années 60, ce seront Frankenheimer, Kubrick ou Joseph Strick. Au cours de la décennie suivante, elle tournera notamment avec Curtis Harrington et Paul Mazursky. De même, peu lui importe qu'il s'agisse d'une petite compagnie, du moment que le script en vaut la peine. Ainsi, AIP (American International Pictures), une jeune société de production, lui offre en 1968 de tenir le rôle de la mère du nouveau Président des Etats-Unis dans un futur proche, et il s'agit d'un chanteur de rock dans "Les Troupes de la colère" (Wild In The Streets) de Barry Shear. Elle accepte de tourner dans ce film "révolutionnaire" où les jeunes prennent le pouvoir et placent leurs parents dans des camps de concentration.
En 1970, Roger Corman, "vieux de la vieille", mais qui a "toujours surpris" son public lui fait incarner une célèbre gangster dans "Bloody Mama". Les années 70 et 80 la verront tout aussi active au cinéma. En 1972, elle à nouveau nominée pour l'Oscar, grâce à un film catastrophe : "L'Aventure du Poséidon" (The Poseidon Adventure) de Ronald Neame, également admirablement interprété par Gene Hackman et Ernest Borgnine. L'actrice a écrit son autobiographie, simplement intitulée Shelley; elle y raconte sa vie tumultueuse, ses amours avec John Ireland, Burt Lancaster, ses fiançailles avec Farley Granger, ses mariages avec Vittorio Gassman et Anthony Franciosa, ses amitiés avec Marylin Monroe, Howard Hugues, Marlon Brando, Charles Laughton parmi tant d'autres. Shelley Winters tournera au cinéma jusqu'à la fin des années 90 et décède le 14 janvier 2006 à l'âge de 85 ans à Beverly Hills (Etats-Unis).
Othello - 1947 - George Cukor
La Proie - 1948 - Robert Siodmak
Le Prix du silence - 1949 - Elliott Nugent
La Femme sans loi - 1950 - Louis King
Menace dans la nuit - 1951 - John Berry
La Brigade héroïque - 1954 - Raoul Walsh
Une Fille comme ça - 1955 - Henry Cornelius
Le Trésor de Pancho Villa - 1955 - George Sherman
Le Grand couteau - 1955 - Robert Aldrich
La Peur au ventre - 1955 - Stuart Heisler
Le Journal d'Anne Frank - 1959 - George Stevens
Le Coup de l'escalier - 1959 - Robert Wise
Que personne n'écrive mon épitaphe - 1960 - Philip Leacock
Les Liaisons coupables - 1962 - George Cukor
Le Divan de l'infidélité - 1963 - John Rich
La Plus grande histoire jamais contée - 1965 - George Stevens
Un Coin de ciel bleu - 1965 - Guy Green
Détective privé - 1966 - Jack Smight
L'Aventure du Poséïdon - 1972 - Ronald Neame
Un Bourgeois tout petit petit - 1977 - Mario Monicelli
Le Roi des gitans - 1978 - Frank Pierson
Le Visiteur maléfique - 1979 - Giulio Paradisi
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