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CINETOM
15 octobre 2011

ARLETTY, GARANCE OU ATMOSPHERE ?

         ARLETTY                                1898 - 1992    

                Actrice Française 

      

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"Atmosphère...atmosphère...est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère?...". Cette réplique culte est aujourd'hui dans tous les esprits. Cette réplique d'Hôtel du Nord, qu'Arletty prononce avec toute sa gouaille, près du Canal Saint-Martin, à un Louis Jouvet cynique...C'est Marcel Carné qui propulsa définitivement Arletty au firmament des actrices françaises de l'entre-deux-guerres.

Ses meilleurs films : "Pension Mimosas" de Jacques Feyder, "Faisons un rêve", "Les perles de la couronne" ainsi que "Désiré" tous trois de Sacha Guitry, "La Chaleur du sein" de Jean Boyer, "Hôtel du Nord","Le Jour se lève, "Les Visiteurs du Soir" et "Les Enfants du Paradis" (ses meilleurs films), "Fric-Frac" de Autant-Lara, "Circonstances atténuantes" de Jean Boyer, "Madame Sans-Gêne" de Roger Richebé, "Huis Clos" de Jacqueline Audry, "Maxime" de Henri Verneuil et "Le Jour le plus long" (sa participation)

     

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Actrice française née le 15 mai 1898 à Courbevoie, de son véritable nom : Léonie Bathiat. Son père auvergnat conducteur de tramways, sa mère lingère. Elle fut dactylographe jusqu'en 1920. C'est par hasard, dans la rue, que Arletty rencontre Paul Guillaume, personnalité qui imposa l'Art Nègre et le Cubisme. Il lui formula de nombreux conseils dont celui de tenter sa chance au théâtre et lui donne une lettre de recommandation pour le directeur du Théâtre des Capucines. Celui-ci l'engage dans un emploi bien précis à l'époque : "petite femme de revue".

Arletty renonce à s'appeler Léonie Bathiat, elle choisit après avoir lu "Mont-Oriol" de Maupassant, de devenir "Arlette". Puis à l'instigation de Tristan Bernard, elle ajouta un i au bout, puis transformera le i en y. Extraits de "Noir&Blanc d'Olivier Barrot et Raymond Chirat aux Editions Flammarion

Actrice déconcertante, inspirée, lucide, elle suscite dès ses débuts la curiosité, les rires, l'approbation, l'admiration et sans doute la jalousie. Sa fantaisie mise en valeur par une plastique sans défauts se pare d'une grâce insouciante. Elle garde et diffuse le reflet des années folle. Arletty promène déjà son fameux regard chaviré dont parle Colette et s'amuse à coller sur sa figure les masques du plaisir et de la fête. Donc parisienne, encore qu'elle se réclame de son cher Courbevoie, mais d'ascendante auvergnate dont elle se targue.

Après avoir travaillé dans différents music-halls, Arletty fit ses vrais débuts à l'écran dans "Un Chien qui rapporte" (1931) de Jean Choux aux côtés de René Lefevre et Paulette Dubost. Le cinéma parlant commence à se diffuser dans tous les cinémas de France, Arletty avait refusé de jouer dans des films muets, mais accepte un petit rôle dans "La douceur d'aimer" de René Hervil, sa première participation à un film parlant. Malheureusement ces deux expériences l'avaient épouvantée, Arletty se trouvait "horrible et mal photographiée", elle ne souhaitait pas renouveler l'expérience.

Arletty s'emploie à soigner sa photogénie, à colmater l'écart entre ses dents, à imposer une beauté à nulle autre pareille.  Entre-temps, elle enchaîne les tournages, c'est en 1935 qu'elle joue un rôle épisodique mais très remarqué dans "Pension Mimosas" de Jacques Feyder dont son assistant n'est autre que Marcel Carné...

C'est Sacha Guitry qui lui propose de figurer dans le prologue filmé qu'il ajoute à "Faisons un rêve"  (1936), en compagnie de comédiens et de comédiennes de renom. La robe qu'elle porte à cette occasion  remplace son cachet. Pour sa première grande fresque pseudo-historique le Maître lui fignole le rôle d'une reine d'Abyssinie dans "Les Perles de la couronne" (1937). Arletty obtient un vif succès personnel dans une scène qui n'est autre qu'un sketch de revue...

"Désiré" (1937), troisième atout, fournit à la piquante actrice le rôle déluré de Madeleine, la femme de chambre de Jacqueline Delubac. Elle s'y montre radieuse, svelte, souple dans ses mouvements. Elle dresse la table avec ses partenaires Guitry et Pauline Carton et il en résulte une sorte de ballet supérieurement réglé et, de ce fait, inoubliable.

Arletty apparaît à l'écran dans l'adaptation fine, soignée, exacte du roman "Le Petit Chose"  d'Alphonse Daudet réalisée en 1938 par Maurice Cloche. Le film, oublié depuis belle lurette, étonna à sa réapparition: à croire que ceux qui le découvrirent n'avaient jamais parcouru cette histoire d'un enfant; certains y décelèrent même des traces d'homosexualité dans les liens qui unissent Daniel Eyssette à son frère ainé. D'autres virent dans le personnage de la théâtreuse, mauvais génie du "Petit Chose", une préfiguration de Garance....             

En 1938, elle participe à une aimable comédie qui l'unit à Michel Simon dans "La Chaleur du sein" (1938) de Jean Boyer. Mais ce fut son succès personnel dans "Hôtel du Nord" (1938) qui marqua le début de sa collaboration artistique avec Marcel Carné. Sa fameuse réplique "Atmosphère...atmosphère...est-ce que j'ai une gueule d'atmosphère? restera gravé dans toutes les mémoires des cinéphiles mais aussi des français. 

Son personnage se fit plus dense avec "Le Jour se lève" (1939), où elle interprétait le rôle complexe de Clara. Ses jambes gainées de noir s'évadant d'un tutu vaporeux, rôle qui semble secondaire et dont on ne peut oublier ni la gravité, ni le mépris, ni la tendresse. "Arletty en Clara distille la grâce et l'émotion, roulée comme un caillou par le torrent de la vie. Le coeur intact. Grande de corps et d'âme. Mince, flexible et brûlante. Affranchie comme pas une et sentimentale comme toutes." Ainsi la décrit Jacques Natanson dans "Paris-Spectacle.

Arletty pouvait tenir des rôles très différents tout en restant parfaitement convaincante, comme le prouvent des films tels que "Fric-Frac" (1939) co-réalisés par Claude Autant-Lara et Maurice Lehmann. Michel Simon et Fernandel se disputeront la présence de la comédienne, c'est Michel Simon qui aura le privilège de jouer à nouveau avec Arletty dans "Circonstances atténuantes" (1939) de Jean Boyer. Le film fut tourné seulement en quinze jours, dans la bonne humeur, Michel Simon interprétant l'austère magistrat, Gaël Le Sentencier. La chanson de Georges Van Parys : "Comme de bien entendu" devint populaire et la France chantonna ce refrain....

 La drôle de guerre qui n'amuse vraiment personne va tourner à la déconfiture. "Tempête" (1939) de Bernard Deschamps, également connu sous le titre de "Tempête sur Paris" fut distribué en avril 1940, c'est l'un des derniers films sortis en France avant la débâcle. C'est aussi la première réunion d'Arletty et de Erich Von Stroheim dans un même générique, mais n'ont aucune scène ensemble. Ils se retrouveront après la guerre dans "Portrait d'un assassin" (1949) de Bernard Roland.

Arletty déclara "j'ai été, je peux le dire, la plus payée de mon pays pendant quelques mois. Mais c'était pas à se vanter :parce que ça ne changeait rien. Je n'avais pas plus de qualité parce qu'on me payait plus cher que je n'en avais dix ans avant à jouer dans des revues.

Projet d'avant-guerre que concrétise Roger Richebé, initialement prévu en couleurs : "Madame Sans-Gêne" (1941) fut l'un des trois films français produit sous l'Occupation. Les extérieurs furent tournés au château de Grosbois, occupé par un général de l'aviation allemande et son état-major. L'officier consentit à "prêter" sa résidence pour une journée, grâce à l'intervention personnelle d'Arletty, ce qui lui valut quelques ennuis à Libération...

Ensuite des rôles à toilettes, celles somptueuses et extravagantes qui portent la griffe de Robert Piguet, couturier à la mode. Elle est à l'affiche de "Boléro" (1941) de Jean Boyer aux côtés de André Luguet et Jacques Dumesnil. Puis une comédie de boulevard d'un éclat relatif : "L'Amant de Bornéo" (1941) de René Le Hénaff et Jean-Pierre Feydeau avec Jean Tissier.  Arletty anime avec Noël-Noël un des sketches d'Yves Mirande pour "La femme que j'ai le plus aimée" (1942) de Robert Vernay 

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                                Le Jour se lève - Marcel Carné

 

    

              

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"Les Visiteurs du Soir" (1942) de Marcel Carné,  Arletty apparaissait en troubadour, du prénom de Dominique, l'androgyne envoyée du diable. Rôle énigmatique qu'elle a considéré à juste titre comme le tournant de sa carrière. Troublante et magnifique lorsqu'elle chevauche aux abords du château. Les autres interprètes sont : Marie Déa, Jules Berry, Fernand Ledoux, Alain Cuny ainsi que des figurants aux noms célèbres (Simone Signoret, Jean-Pierre Mocky et Alain Resnais) .  

Arletty attend Garance dans "Les Enfants du Paradis" (1945) de Marcel Carné, la mystérieuse, promise par les copains Prévert et Carné : son plus beau rôle de femme qui est, comme elle l'a dit, le plus beau rôle de femme. Maîtrise totale de l'artiste, elle interprète la première époque sur deux registres : l'acidulé et le doux, retrouvant les accents d'autrefois et les tempérant lorsque la tendresse amoureuse l'envahit. Quand le rideau se lève sur la deuxième époque, elle n'est plus que gravité, nostalgie discrète, mélancolie profonde. Le tournage commence le 16 août 1943 mais il est interrompu en raison de l'imminence du débarquement allié en Normandie. Ce long métrage ne verra le jour qu'au début de 1945 alors qu'Arletty est en surveillance survéillée A la sortie triomphale des "Enfants du Paradis", le film est resté 54 semaines en exclusivité, et fut classé comme étant le premier film de l'histoire du cinéma français, lors d'une retransmission de "La plus belle Nuit du Cinéma" sur Canal+ en présence du cinéaste Marcel Carné qui fut récompensé.

 C'est en 1949 qu'Arletty fit sa rentrée cinématographique avec "Portrait d'un Assassin" aux côtés de Pierre Brasseur, Erich von Stroheim, Marcel Dalio, Maria Montez et Jules Berry. Malheureusement ce film ne connaîtra pas un grand succès commercial.   Arletty retrouve le théâtre avec un certain succès dans "Un Tramway nommé Désir" dans une mise en scène de Raymond Rouleau, en 1959, c'est "La descente d'Orphée". Elle fit également une mémorable imitation de Piaf dans une revue à l'Empire.  En 1966, Arletty reprend "Les Monstres Sacrés" (1966) de Cocteau.

Après sa création de "Garance", Arletty ne devait plus apparaître que dans une série de films que la plupar des historiens considèrent indignes de son talent. "Gibier de Potence" (1951) de Roger Richebé est le second d'entre eux après une interruption de quatre années. Le film bénéficia d'une bonne presse et Arletty confia par la suite que ce personnage d'entremetteuse demeurait l'un de ses préférés : "ça c'est un rôle que je trouve merveilleux, avec un sujet vraiment excellent...C'est peut-être le titre qui lui a fait du tort..." (in Arletty", par Philippe Ariotti et Philippe de Comes, Ed. Henri Veyrier,1978)

Elle enchaîne avec "L'Amour Madame" (1951) du cinéaste Gilles Grangier. très âgée, vêtue de blanc, sachant toujours écouter, elle répond avec une politesse mesurée par la fatigue. Arletty, par sa fabuleuse trajectoire dans la voie lactée, reste un cas unique dans le cinéma français.   

"Huis-Clos" (1954) est une pièce en un acte de Jean-Paul Sartre, mis en scène par la réalisatrice Jacqueline Audry qui estima avoir été "d'une fidélité absolue à Sartre". Aux côtés d'Arletty, Gaby Sylvia, Jean Murat et Franck Villard.  La comédienne retrouva, quinze après "Le Jour se lève", toute l'équipe de Carné sans Prévert mais avec Gabin, dans "L'Air de Paris" (1954).

En 1962, Arletty est au générique des acteurs français du "Jour le plus long" produit par Darryl Zanuck. La carrière d'Arletty fut tragiquement interrompue par la cécité, elle est contrainte à abandonner les studios. Sa dernière apparition au cinéma "Le Voyage à Biarritz" (1963) de Gilles Grangier où elle retrouve Fernandel. Ajoutons qu'elle a merveilleusement raconté les péripéties de son existence dans un livre magnifique, "La Défense", dont le style est assez célinien...

Arletty décède le 23 juillet 1992 à Paris, à l'âge de 94 ans.  

     

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                                         Arletty et Bernard Blier

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                                               Marcel Carné - Roland Lesaffre

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