RENÉ CLÉMENT, UNE VISION CINÉMATOGRAPHIQUE IRRÉPROCHABLE
RENÉ CLÉMENT 1913 - 2001
Cinéaste, Scénariste, Producteur Français
Membre fondateur de l'I.D.H.E.C. Il fut un grand réalisateur français, René Clément avait fait ses classes comme conseiller technique de Jean Cocteau pour "La Belle et la Bête" (1946) et à qui l'on doit l'un des rares films français proches du courant néo-réaliste, "La Bataille du rail" (1946), reste essentiellement un bon artisan, entièrement dépendant des scénarios. Son plus grand succès restera "Jeux interdits" (1952) avec Brigitte Fossey.
René Clément est né à Bordeaux (Gironde), le 18 mars 1913. Son père était décorateur. Après des études d'architecture, il entre à l'Ecole des Beaux-Arts de Paris et, passionné de cinéma, tourne des films en 16 mm, des essais d'avant-garde qui lui permettent de se familiariser avec la caméra. Il débute, en 35 mm, dans le dessin animé, avec "César chez les Gaulois". Après le décès de son père, il abandonne l'architecture pour se consacrer, comme opérateur, au cinéma.
En 1934, il fait la connaissance de Jacques Tati et collabore avec lui sur des gags visuels. Après avoir effectué son service militaire au Service Cinématographique des Armées, il part pour la Tunisie, avec Jean Lehérissey afin de réaliser un reportage "Au seuil de l'Islam". En 1937, il tourne son premier court-métrage "Soigne ton gauche", avec Jacques Tati. De 1937 à 1939, René Clément tourne une série de courts-métrages sur les sujets les plus divers, on peut citer : "La Symphonie française du travail" (1937), "La Grande chartreuse" (1938), "Paris la nuit" (1939).
La guerre interrompt ce début de carrière, démobilisé en 1940, il signe avec l'opérateur Henri Alekan plusieurs bandes pour le "Centre des Jeunes". En 1944-45, avec le concours de la Résistance, il réalise sur le réseau de la SNCF, son premier grand film, "La Bataille du rail", lequel retraçait, avec un grand souci d'exactitude documentaire, un glorieux épisode de la Résistance. Ce premier fim de Clément remporta plusieurs prix et lui valut une renommée immédiat, on reconnaissait avant tout en lui un technicien de premier ordre. A ce titre, il avait été le collaborateur et "conseiller technique de Jean Cocteau pour "La Belle et la Bête" avec Jean Marais et Josette Day comme il fut celui de Noël-Noël dans "Le Père tranquille" (1946), sur un scénario du comédien. Le film fut présenté au Festival de Cannes en 1946.
"Les Maudits" (1947), deuxième long métrage de René Clément imposa ce cinéaste comme l'un des plus grands de l'après-guerre. L'arsenal de Toulon prêta un sous-marin de 1500 tonnes ainsi que le personnel pour les prises de vues en mer. Ce sous-marin fut reconstitué en bois, en studio, pour les intérieurs. Il mesurait 70 mètres de long et était démontable pour placer les caméras à n'importe quel endroit. Ce qui permet à Clément de réaliser le fameux travelling qui accompagne la montée à bord d'Henri Vidal. "Les Maudits" a obtenu le Grand Prix du film d'aventures au Festival de Cannes 1947. Présenté au Festival de Cannes 1949 "Au-delà des grilles" (1949) y obtint le Prix de la mise en scène ainsi que celui de la meilleure interprétation féminine à Isa Miranda. Il reçut également l'Oscar du meilleur film étranger de l'année 1950.
Très bien accueilli par la critique, "Le Château de verre" (1950) dérouta le public : "Clément construisit son dénouement en insérant un fragment de futur dans le présent - Michèle Morgan fait avancer la montre de Jean Marais -A ce moment, l'auteur désamorce tout suspense, intercale l'épisode de l'accident d'avion dans lequel elle trouvera la mort et qui, chronologiquement et logiquement, prend sa place à la fin du film. La légende veut que la paresse du public et la veulerie des producteurs aient contraint Clément à modifier son film (Gilles Jacob "Le Cinéma moderne", éditions Serdoc).
Clément aborde plusieurs genres, la critique déconcertée par ces voltes-faces, est partagée. Mais, pour le cinéaste, chaque film fait l'objet d'une étude particulière, que sa parfaite connaissance du métier lui permet de pousser sur un plan ou sur un autre. Du scénario au montage, il a tout expérimenté; c'est encore la Seconde Guerre mondiale qui sert d'arrière-plan à "Jeux interdits" et plus précisément ces dramatiques journées de juin 1940 qui virent la déroute de l'armée française face à la ruée irrésistible des divisions allemandes et l'exode massif des civils se précipitant pêle-mêle sur toutes les routes de France et offrant une cible facile aux avions ennemis. Salué comme un chef-d'oeuvre par la critique, est considéré aujourd'hui comme un classique du cinéma français.
Les films suivants confirment la maîtrise du technicien et l'intelligence du cinéaste, son huitième film "Monsieur Ripois" (1954) tourné à Londres, sur deux immenses plateaux des studios d'Elstree et dans les rues de Londres. Les prises de vues en extérieur se firent à l'insu des passants, avec une caméra dissimulée, ce qui permettait d'enraciner parfaitement la fiction dans un contexte réaliste proche du documentaire. "Monsieur Ripois", que Gérard Philipe considérait comme son meilleur rôle, a obtenu le Prix Spécial du Jury pour la mise en scène au Festival de Cannes 1954.
Deux ans plus tard, il réalise "Gervaise" d'après "L'Assomoir" de Emile Zola, honorable et consciencieuse adaptation de Zola, avec Maria Schell en victime de l'alcoolisme vaut mieux que "Barrage contre le Pacifique" (1957), co-production internationale ampoulée, adaptée d'un livre de Marguerite Duras. "Plein soleil" (1959) d'après le roman de Patricia Highsmith, le meilleur film de Clément avec "Monsieur Ripois", (pour de nombreux critiques de cinéma) révèle de façon fort intéressante l'influence grandissante de la nouvelle génération de metteurs en scène français : photographie très "fluide" d'Henri Decae, qui vient de s'imposer comme l'un des chefs opérateurs les plus talentueux de la nouvelle vague, nouveaux visages : Alain Delon et Marie Laforêt et hommage implicite à Hitchcock tant par le style que par le scénario.
De nombreuses séquences du film "Le Jour et l'heure" (1963) se déroulent dans un train et rappellent, évidemment, les débuts de René Clément : ses courts métrages, "Le Triage" (1940) et "Ceux du rail" (1942), il reviendra souvent sur la période trouble de l'Occupation avec "Paris brûle t'il ?" (1966), une fresque sur la libération de Paris et une pléiade d'acteurs : Orson Welles, Kirk Douglas, Alain Delon, Jean-Paul Belmondo, Simone Signoret, Yves Montand, Anthony Perkins, Bruno Cremer, Michel Piccoli, Charles Boyer, Jean-Pierre Cassel, Jean-Louis Trintignant, Claude Rich, Daniel Gélin, Pierre Dux, Gert Froeber et tant d'autres. Chacun de mes films, déclara René Clément, est la somme de tout ce que j'ai appris auparavant dans tous les domaines.
Le 2 juin 1969 débuta le tournage de l'un de mes films préférés "Le Passager de la pluie" (1970), tourné à la presqu'île de Giens et se termina sur la côté d'Azur. Le cinéaste apporta une dimension nouvelle au suspens dramatique et policier. Par l'utilisation de longues focales, d'objectifs spéciaux, il obtint un climat onirique où les personnages se détachent sur un fond irréel, et passe de l'abstraction aux réminiscences concrètes. "Le Passager de la pluie" connut un grand succès public et révéla les talents dramatiques d'Annie Cordy aux côtés de Marlène Jobert et Charles Bronson. Après avoir mis en scène "La Maison sous les arbres" (1971) avec Faye Dunaway avec le concours de Gilbert Bécaud pour la musique, Clément tournera ce qui restera son dernier film par excellence "La Course du lièvre à travers les champs" (1972) avec Jean-Louis Trintignant, Robert Ryan et Léa Massari. En 1984, il reçut le César d'honneur en 1984 et reste le cinéaste le plus primé du Festival de Cannes avec cinq récompenses. René Clément meurt le 17 mars 1996 à Monaco à l'âge de 82 ans.
Paris brûle t'il ? - 1966