DÉCÈS DE LA CINÉASTE BELGE CHANTAL AKERMAN
DECES DE LA CINEASTE BELGE
CHANTAL AKERMAN 1931 - 2015
La réalisatrice belge Chantal Akerman est décédée lundi 5 octobre 2015 à Paris à l'âge de 65 ans, a annoncé mardi à l'AFP son producteur. Elle a mis fin à ses jours, selon son entourage. La cinéaste, qui souffrait de troubles maniaco-dépressifs, avait commencé sa carrière à la fin des années 60. Elle était notamment la réalisatrice de "Jeanne Dielman, 23, quai du commerce, 1080 Bruxelles" (1975) et "La Captive" (2000).
Son dernier film, "No Home Movie", consacrée à sa mère qui avait survécu aux camps de concentration, avait été présenté cet été au Festival de Locarno (Suisse). "C'était une énorme cinéaste qui, par sa singularité, a révolutionné quelques pans du cinéma international", a souligné son producteur Patrick Quinet, sans préciser les causes exactes de son décès.
Issue d'une famille de juifs originaires d'Europe centrale venue s'installer en Belgique dans les années 30, Chantal Akerman était la réalisatrice de près de 50 films, allant du documentaire à la comédie musicale. Elle y développait notamment les thèmes du temps et de la mémoire.
Libération
«Je viens de me réveiller [sur la côte ouest des Etats-Unis, ndlr] et d’apprendre la nouvelle, je crois que tout le monde autour de moi est en état de choc. J’ai découvert son travail à l’université, et je crois que le premier film était Jeanne Dielman. Ce fut une de ces expériences qui changent votre manière de penser, de voir, de concevoir le cinéma. Cela a eu un impact profond sur la manière dont je peux concevoir l’idée de narration ou la façon de dépeindre la vie d’une femme à l’écran : cette expérimentation du film de se river à la routine de tâches domestiques d’une femme et cette caméra à la Ozu qui se confronte absolument à elle dans sa cuisine, tout cela a suscité en moi une émotion inimaginable.
«Les gens en parlent en termes de durée, de longueur des plans, mais c’est un film d’un suspense extraordinaire, doté d’une puissance imprévisible sur la manière à arracher du sens aux événements et détails les plus ténus, qui au gré de ce temps prospectif propre au film en deviennent inquiétants, palpitants. Si bien qu’il suffit de cette scène où Jeanne Dielman interrompt son rituel de la préparation du café pour que la salle entière se retrouve, je m’en rappelle, suffoquée. Ce film exerce un pouvoir unique sur vous, par sa seule manière de se concentrer sur certaines choses et d’en exclure d’autre, son caractère politique, son éthique particulière.
«Jeanne Dielman est une femme plus forte, confrontée à des choix plus difficiles, que le personnage de mon film Safe, mais il y a un lien évident pour moi entre eux. Et la composition du film, la manière dont des objets domestiques jouent un rôle crucial par rapport au sujet, tout cela m’a massivement influencé, tout comme ce film et son langage conceptuel si inventif peuvent être extrêmement présents à l’esprit de Gus van Sant, dont je sais qu’il l’adore et lui doit beaucoup.
«Je n’ai pas vu tous ses autres films, mais nombre d’entre eux, commeNews from Home, les Rendez-vous d’Anna ou Je, tu, il, elle m’ont immensément affecté. Elle avait un langage cinématographique à elle seule, fait autant d’inventions formelles que d’humour. Je repense à la dernière fois que je l’ai vue à Paris, et cela me rend très triste.»
«J’ai été marqué par nombre de ses films, ainsi que des installations incroyables qu’elle a faites pour des musées, mais par-dessus tout c’est la découverte de Jeanne Dielman qui m’a incommensurablement marqué quand j’étais étudiant en cinéma. Je le revois souvent depuis, chez moi, et je reste stupéfait des frontières qu’elle explose dans ce film, ce qu’elle y invente en termes de narration, de rapport au personnage. Quand j’ai fait des films commeGerry, Elephant et Last Days, cela a constitué pour moi une influence plus qu’essentielle : il y avait pour moi Bela Tarr et Chantal Akerman.»
__________________
1974 1975
Jeanne Dielman. Dir. Chantal Akerman, 1975)
1978
1984 1986
1988 1990
1995 1999
2003 2011
_____________________________Ingrid Bergman