Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
CINETOM
10 novembre 2013

AUGUSTE ET LOUIS LUMIERE, UNE INVENTION CINEMATOGRAPHIQUE

          AUGUSTE LUMIERE                1862 - 1954

                     LOUIS LUMIERE                      1864 - 1948   

            Inventeurs du cinématographe, Cinéastes Français 

                                                                             

Le 28 décembre 1895, les frères Lumière organisaient la première projection cinématographique publique "La sortie des Usines Lumière". Le cinéma était né.

Louis Lumière est né le 5 octobre 1864 à Besançon deux après son frère Auguste. Leur père Antoine, artiste dans tous les sens du mot, peintre, chanteur, menait une vie difficile. Etant souvent obligé de payer ses dettes en faisant le portrait de ses fournisseur. En 1870, Antoine Lumière vint s'installer à Lyon. Il ouvrit un petit atelier de photographe dans un appentis en bois, rue de la Barre contre l'Hôtel-Dieu.

"Nos premiers souvenirs de jeunesse, disaient Louis et Auguste, sont liés à un mélange d'odeurs qui flottaient dans l'échoppe paternelle : parfum de châtaignes rissolant dans la poêle d'un Auvergnat voisin, senteurs piquantes de produits photographiques et de vernis". L'affaire familiale demandait beaucoup d'efforts et souvent le dimanche, Louis et Auguste étaient embauchés pour découper les plaques. Ce travail fastidieux ne les détourna pas de la photographie, au contraire !

En vacances à St-Enogat, en Bretagne, au lieu de s'amuser sur la plage, ils prenaient des clichés qu'ils développaient dans une grotte appelée "La Goule aux Fées". C'est là qu'ils firent le serment de signer tous leurs travaux de leurs deux prénoms, signe de l'affection profonde qui les unissait, prémonition des inventions et découvertes futures.

En 1881, Louis, élève à l'école de la "Martinière" à Lyon, conçut pour son père une plaque photographique au gélatino-bromure d'argent, supérieure en qualité à celle que le belge Monkhoven venait de lancer sur le marché. La plaque eut un succès immédiat. La production familiale se révéla vite insuffisante. Antoine acheta, en s'endettant, une chapellerie abandonnée dans le quartier de Montplaisir. Chaque membre de la famille participa à l'installation d'une petite usine destinée à fabriquer la plaque inventée par Louis Lumière et qui devint fameuse dans le monde entier sous le nom de plaque "étiquette bleue".

Dix ans plus tard, en 1895, la Société Antoine Lumière et ses Fils produisait 15 millions de plaques et occupait 300 ouvriers. Elle était devenue la première usine de produits photographiques d'Europe et probablement du monde. George Eastman de Rochester s'en inquiéta et vint même à Lyon pour essayer de s'entendre avec ce grand concurrent.

A cette époque, la photographie avait atteint un tel point de perfection technique que des chercheurs tels que Marey ou Demeny en France, Muybridge aux Etats-Unis...eurent l'idée de l'utiliser pour décomposer et analyser les mouvements de l'homme et des animaux. Ils prenaient une succession de clichés très rapides et c'est ainsi que l'on sut, par exemple, comment se comportait un cheval au galop et que l'on put corriger les erreurs commises jusqu'alors par la plupart des peintres. C'était la chronophotographie".

Edison réussit même à faire une synthèse du mouvement. Il anima des photographies grâce au vieux principe que Plateau avait utilisé pour ses dessins en 1832. Cette animation était faite dans une grande caisse en bois appelée "Kinetoscope". Elle était visible à travers un oculaire par une seule personne. Mais Edison ne pouvait le projeter en raison du trop faible rendement lumineux de son système. C'est au cours d'une nuit d'insomnie de l'été 1894 que Louis Lumière découvrit la solution idéale pour une synthèse parfaite du mouvement. Le gros problème qui avait dérouté Marey, Demeny et Edison était celui de la traction intermittente, rapide et régulière de la pellicule. Le mécanisme Lumière immobilisait 16 fois par seconde la pellicule derrière l'objectif pendant un temps suffisant pour permettre une projection très lumineuse. Fixé sur une platine unique et d'une simplicité géniale il était enfermé dans une petite boîte en noyer. Ce fut le Cinématographe dont le principe reste inchangé dans les caméras les plus modernes. Le même appareil servait à la prise de vues, au tirage des positifs et à la projection; Appareil exemplaire : compact, léger et très performant.

Le 23 février 1895, Louis et Auguste Lumière brevetèrent leur Cinématographe. Fabriqué par un habile opticien français Jules Carpentier. Entre l'enregistrement du brevet et le premier spectacle public dix mois s'écoulèrent, durant lesquels, selon Georges Sadoul, Louis Lumière tourna une centaine de films d'une durée de une minute. Parallèlement, les deux frères soumettaient leur invention à l'attention d'importants cénales scientifiques, à commencer le 22 mars 1895, par la Société d'encouragement à l'industrie national. Le mois suivant, une démonstration eut lieu au cours du congrès des Sociétés françaises de culture et, en juin, à Lyon (ville natale des frères Lumière), ceux-ci présentèrent leur invention aux congressistes de la Société photographique française. Les deux frères enchantèrent leurs spectateurs en filmant les plus célèbres d'entre eux à l'occasion d'une promenade alors qu'ls bavardaient en descendant d'un bateau. Ces projections furent suivies d'autres démonstrations à Bruxelles et à Paris; la presse spécialisée commença à faire paraître des articles enthousiastes sur le travail des frères Lumière.

Vers la fin de l'année, Antoine Lumière (père d'Auguste et de Louis) se mit en quête d'un local adapté à la projection des films. L'historien Jacques Deslandes soutient qu'il y avait, parmi les nombreux endroits retenus, le studio d'un photographe installé au-dessus du théâtre Robert-Houdin, alors géré par le futur cinéaste Georges Méliès. Il y eut aussi des tractations avec la direction du musée Grévin, mais elles ne donnèrent aucun résultat, les "Pantomimes lumineuses" d'Emile Reynaud étant alors encore installées dans le musée. Les Folies-Bergères furent également pressenties.

Finalement, les frères Lumière choisirent le Salon indien du Grand Café, situé au rez-de-chaussée du Grand Hôtel, un immeuble imposant du boulevard des Capucines. Le Salon indien était une grande salle en sous-sol, décorée dans un extravagant style oriental. Peu satisfaits de l'exploitation de ce salon, les propriétaires furent trop heureux de le louer aux frères Lumière pour 30 francs par jour. Ils refusèrent stupidement la proposition des deux frères : un pourcentage de 25% sur les bénéfices. Or, ceux-ci dès la mi-janvier 1896, atteignirent parfois 2500 francs par jour.

Les frères Lumière se firent prêter par le Grand Café cent chaises cannées et dorées, engagèrent un caissier, Clément Maurice, et un projectionniste. Le 28 décembre, on ouvrit les portes au public. La première affiche publicitaire était une jolie composition commandée au peintre Brispot, montrait au premier plan un sergent de ville moustachu tentant de contenir une foule enthousiaste, mise en scène exagérée si l'on tient compte de la modeste affluence de la première journée. Les gens étaient trop occupés par la préparation des festivités du Nouvel An pour aller voir ce spectacle inédit. Il n'y eut que trente-cinq spectateurs ce jour-là. Mais dès le lendemain le bruit de la nouveauté s'étant répandu on assistait à la formation d'une longue file d'attente sur le boulevard. il semble que le programme changeait chaque jour. Il est vrai que les frères Lumière possédaient une réserve importante de films; quoi qu'il en soit, il débutait toujours avec le même titre : "La Sortie des usines Lumière" (1895), le premier film qu'ils aient tourné. C'était à la fois un hommage à leur réussite industrielle et un sujet particulièrement bien choisi. Les portes de l'usine Lumière s'ouvraient et les travailleurs sortaient : la plupart des hommes à vélo, les femmes en longues robes d'été et en grands chapeaux de paille emplumés. Le dernier à sortir était un petit chien. Le film se terminait sur la fermeture des portes.        

       Click to View Larger

La plupart des films des frères Lumière étaient techniquement impeccables et constituaient un album de famille animé, sorte de documentaire sur le mode de vie quotidien des bourgeois aisés, ceux-là mêmes qui faisaient la queue sur les boulevards pour aller au cinéma, de la France de la fin du XIXe siècle. Bien peu prévoyaient alors les évènements qui allaient détruire cet illusoire sentiment de sécurité, cette prospérité et cette paix que l'on croyait faites pour durer.

Les sujets des films étaient très simples. On voyait par exemple Auguste Lumière et son épouse assistant au repas de leur fillette qui, assise entre eux, se livre à toute sorte de mimiques. Dans un autre film, l'enfant suit, fascinée, les évolutions d'un poisson rouge dans un aquarium. On pouvait voir aussi le vieux père Lumière jouer aux cartes et boire de la bière avec des amis, ou encore un monsieur se baignant dans la mer. Un autre montrait Me Lumière et deux enfants  debout sur un quai observant l'arrivée d'une petite barque. Bien d'autres encore proposaient des scènes de rue et de soldats à l'exercice. Certains effets provoquaient l'admiration des foules, comme par exemple la fumée dans un film sur le travail des forgerons et les nuages de poussière soulevés par l'écroulement d'un mur.

Deux films en particulier allaient constituer, pendant des années, le clou de chaque spectacle des frères Lumière. Le premier est "L'Arrivée d'un train en gare de La Ciotat" réalisé en 1895, son cadrage est en tout point remarquable : la caméra légèrement en plongée montre le quai et les voies vides. Puis la locomotive apparaît dans le lointain, grossit jusqu'à occuper tout l'écran avant de "sortir" du champ sur la gauche de l'écran; les passagers montent et descendent latéralement par rapport à la caméra. On raconte que le public présent dans la salle se levait effrayé, lorsque le train fonçait sur eux.

Contrairement à une légende tenace, cette "Arrivée en train d'un gare..." ne fut pas projetée dès la première séance officielle du Cinématographe Lumière, le 28 décembre au Grand-Café, mais seulement en janvier 1896, s'ajoutant à un programme qui comprenait à l'origine "La sortie des usines Lumières à Lyon", "Les Forgerons", "Le déjeuner de bébé", "Le jardinier" (plus connu sous le titre de "L'Arroseur arrosé"...)

L'impact de cette nouvelle "vue animée" fut considérable, certains spectateurs se couchant sous leur siège, persuadés que le bolide allait les écraser! "Le train est le spectacle le plus émouvant qu'on puisse rêver, (...) Il semble sortir de la toile, s'élancer sur vous. Des dames en chair et en os se reculent d'horreur, tant la vérité est foudroyante !(In Mémorial des Vosges Epinal 27 juin 1896).  Ce qui étonne aujourd'hui encore, c'est la beauté et la subtilité de la scène, qui couvre à peine cinquante mètres de pellicule. Louis Lumière, au demeurant était un excellent et fort talentueux photographe, possédant le sens des éclairages et du cadrage. Grâce au long temps d'exposition qu'autorisait le Cinématographe il avait pu jouer sur une grande profondeur de champ.

"L'arroseur arrosé", de 1895 lui aussi, doit son succès et sa réputation au fait qu'il fut le premier film comique de l'histoire du cinéma. Le gag, assez mince en lui-même fit pourtant rire aux éclats les spectateurs de 1895, et décida les frères Lumière à le reprendre comme sujet de leur nouvelle affiche publicitaire. Un garnement pose son pied sur le tuyau d'arrosage d'un jardinier. Perplexe, ce dernier regarde l'orifice du tuyau : le garçon lève le pied et le jardinier reçoit le jet en pleine figure. Alors le jardinier flanque une vigoureuse fessée au mauvais drôle. Sans être plastiquement aussi accompli que "L'arrivée d'un train", "L'arroseur arrosé", selon Georges Sadoul, constitue le premier exemple d'adaptation cinématographique, le gag s'étant en effet inspiré d'une bande desssinée populaire des années 1880. 

N'ayant pas l'intention de se transformer en entrepreneurs de spectacle, les frères Lumière préfèrent exploiter industriellement leur invention. Leur stratégie consista à fournir caméras et pellicules aux projectionnistes et aux opérateurs, tout en laissant à ces derniers, finalement le soin d'assurer le succès du cinématographe de par le monde. Arrivés à pied d'oeuvre, ils avaient pour mission de présenter le spectacle des frères Lumière dans les théâtres, mais aussi de tourner des scènes locales et de "couvrir" les évènements historiques afin d'enrichir le catalogue de la société.

Cette armée d'opérateurs dispersée à travers le monde allait rassembler en quelques années une documentation d'un incomparable intérêt sur la fin d'un siècle. Au nombre de ces véritables pionniers des actualités filmées on retiendra les noms d'Eugène Promio, Felix Mesguisch, Charles Moisson et Francis Doublier. C'est sans doute à la suite d'une erreur de manipulation d'un opérateur  que fut découvert le truc du "film à l'envers", qui devient le "clou" de "Démolition d'un mur". (1895).

Au fil des mois, la composition des programmes proposés par les frères Lumière tendra de plus en plus à la présentation de documentaires et de reportages sur l'actualité. Mais déjà d'autres hommes, tel que Georges Méliès, entrevoyaient un autre avenir pour le cinéma. De l'enregistrement de la "réalité" à sa "mise en scène", le pas ne serait pas long à franchir. Louis Lumière, pour sa part, se refusa à le faire : "Depuis 1900, déclara t'il, les applications du Cinématographe s'étant orientées vers le théâtre, et relevant surtout de la mise en scène, force nous était d'abandonner cette exploitation à laquelle nous n'étions pas préparés."

N'en déplaise à Louis Lumière, la merveilleuse composition de ses films, tant au niveau des cadrages que de l'utilisation de la lumière, en fait, à jamais le "père" de ce qu'on allait bientôt appelé le septième art. Et il est pour le moins merveilleux que le cinéma ait été inventé par hommes nommés "Lumière". Louis Lumière, l'homme aux cents brevets, mourut dans sa villa de Bandol le 6 juin 1948. C'était un homme simple, d'une grande gentillese dont le génie avait su réaliser la très rare alliance de la technique et de l'art.   

 

__________________________

Commentaires
CINETOM
Visiteurs
Ce mois ci 1 473
Depuis la création 1 701 476
Pages
Newsletter
8 abonnés
CINETOM
Derniers commentaires